Le duo d’enchanteurs pop poursuit son dialogue sur un deuxième album inondé de lumière.
A priori, c’est le couple/duo le plus désaccordé qui soit. Lui, Faris Badwan, leader des bien nommés The Horrors, et elle, Rachel Zeffira, soprano classique élevée à Duruflé et Debussy. Lui l’escogriffe anglais à moitié d’origine palestinienne, elle l’Italo-Canadienne qui n’avait jamais, avant leur rencontre, écouté un seul album issu de la sphère indie.
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Un coup de foudre amoureux et artistique
“Dans mon petit village au Canada, les jeunes écoutaient de la country et du metal, jouaient au hockey et au basket, moi je n’étais pas douée pour le sport et mes seules boussoles musicales étaient la musique classique et la pop commerciale du Top 50.”
L’improbable coup de foudre amoureux et artistique de ces étoiles contraires aura pourtant provoqué depuis le début de la décennie plus d’étincelles qu’un 14 Juillet. Sur leur premier album, en 2011, leurs mélodies divines semblaient incrustées à l’intérieur d’un diamant noir, et leurs voix fusionnelles, comme en prolongement de leur relation privée, possédaient cette beauté chimique des grands nectars sixties. Retardé par l’écriture d’une BO (The Duke of Burgundy) qui leur permit de mettre en pratique leur amour, entre autres, pour Nino Rota, le second album de Cat’s Eyes ressemble à une échappée vers la lumière. “Sur le premier, confirme Faris, nous étions encore sur une musique de nuit ; c’est plus de l’aube et du jour dont il s’agit ici.”
Envoûter pour mieux régner
Faris ouvre la porte de cette Treasure House par la miniature du même nom, qui évoque Syd Barrett chevauchant une harpe céleste, avant que Rachel prenne le relais sur un Drag drapé de cordes et secoué par les timbales, minaudant façon Claudine Longet qui aurait vu le loup Hazlewood. Le catalogue des merveilles s’effeuille ensuite sur une Chameleon Queen avec orgues, chœurs antiques et trompettes baroques inspirées par Aphrodite’s Child et, en trois titres seulement, Cat’s Eyes a prouvé que ses capacités d’envoûtement demeuraient intactes.
Le pétulant Be Careful Where You Park Your Car vient rappeler qu’à l’origine c’est un échange privé à propos des girls bands des sixties qui présida à ce side project :
“J’ai toujours collectionné les singles des groupes de filles dans la lignée des Shangri-Las, et j’ai initié Rachel à cette obsession. Un jour, alors que j’étais en tournée avec The Horrors, elle m’a envoyé un titre dans le style qu’elle avait composé. J’ai répliqué par une autre chanson, et au bout de plusieurs allers-retours on s’est rendu compte qu’on tenait une idée.”
Plus vaporeux et gothique que son équivalent américain She & Him (M. Ward et Zooey Deschanel), Cat’s Eyes est un acte de foi et d’allégeance tout aussi méticuleux et antiparodique, qui vise à s’étalonner sur ses modèles et y parvient de façon éblouissante. A en croire ses protagonistes, si leur musique est solennelle, l’essentiel du projet est orienté vers une forme d’amusement stylé et sans prétention. Pour preuve, après avoir réussi à s’incruster au Vatican à l’époque du premier album, le duo farceur et quelques flibustiers complices sont parvenus à jouer un titre en avril dernier lors d’une réception privée à Buckingham Palace, où ils n’avaient en rien été conviés. Sa Majesté et la leur étaient pourtant parfaitement raccord.
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