Dans le plus gros coffre à jouets du monde, le film le plus pourri de l’été.
C’est le coffre à jouets le plus luxueux du monde. Tous les deux étés, depuis seize ans, Michael Bay le déverse tout entier, devant nos yeux ébahis par tant de richesse : des avions, des voitures, des robots, des Barbie, des mitraillettes et des pétards à n’en plus finir. Déverser n’est cependant pas le meilleur terme : gerber serait plus approprié.
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C’est désormais une évidence : peu de cinéastes ont fait preuve, dans la longue histoire du blockbuster, d’un tel hermétisme à la mise en scène, d’une telle incapacité à concevoir un plan – même Roland Emmerich a fini par s’améliorer, un peu. Les légers progrès enregistrés par The Island et le premier Transformers, films qui comportaient, sans doute inconsciemment, quelques bonnes idées, ont ainsi fait long feu.
Transformers 3 reproduit à l’identique – pourquoi changer une recette engendrant des milliards de dollars – le schéma de ses prédécesseurs : une heure de comédie d’action (navrante), une heure et demie d’explosions tous azimuts (harassante).
Les Decepticons essaient toujours, pour quelque obscure raison, d’y détruire l’espèce humaine, protégée vaille que vaille par les Autobots. Shia LaBeouf est toujours cet antihéros falot, à qui l’humour de caserne permet de lever les plus jolies filles (Rosie Huntington-Whiteley, dont les lèvres semblent taillées dans un pneu Pirelli et les jambes extraites d’un calendrier du même nom), quand il ne copine pas avec des GI filmés au ralenti, bazooka en bandoulière.
L’idéologie, enfin, ne varie pas de la ligne Bruckheimer-Nietzsche fixée très tôt : d’un côté des bidasses et des mécanos, héros libres et vaillants, de l’autre les parasites serviles de Washington. Dans le monde idéal selon Bay, le ministère de la Santé, cette relique du Welfare State, se voit ainsi recyclé en garage high-tech.
L’espoir, quant à ce troisième opus, provenait surtout de l’ajout du relief. On le sait, la 3D empêche de sur-découper, pour ne pas fatiguer l’œil, et tend à plastifier les corps jusqu’à les faire ressembler à des jouets. Les robots Hasbro s’humanisant pendant que les humains se robotisent ?
Il y avait là une belle idée théorique à portée de main, dont Joe Dante, modèle évident de la franchise, aurait su se saisir. Mais Bay, artificier aux tout petits bras, n’essaie même pas.
Faisant de Chicago, chef-d’œuvre de verre et d’acier, son terrain de jeu, il se contente de tout broyer, dans un geste d’enfant gâté que viennent tout de même compenser quelques beaux passages (étreinte funeste d’un robot-ver et d’un building, plongée dans le vide). Une fois le coffre vidé, ne reste que matière inerte, boulons et écrous éparpillés, enfants éplorés.
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