Une dramédie lunaire, avec François Damiens en attachant et inattendu clown blanc face à un Vincent Macaigne ingérable.
Après s’être maladroitement autorisé une sortie de terrain dont il ne subsiste qu’un authentique navet (Le Moine, 2011), Dominik Moll revient avec Des nouvelles de la planète Mars faire du pied au sujet qui lui avait jadis valu une reconnaissance tous azimuts (public, critique, profession) : la névrose midlife crisis en environnement petit-bourgeois.
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Avec cette différence majeure : là où Harry, un ami qui vous veut du bien (2000) tirait la question vers le thriller, Des nouvelles de la planète Mars choisit une option plus légère et comique – ce qui pourrait ressembler à une facilité, un assagissement, mais qui réussit en fait plutôt bien au cinéaste.
Système de valeurs équilibré et confortable
Philippe Mars (François Damiens) est un ingénieur divorcé, père de deux ados et pétri d’une sorte de bon sens mollet, d’un système de valeurs équilibré et confortable qui tolèrerait volontiers le changement sans s’avouer qu’il le redoute tout de même pas mal. Jusqu’à ce qu’entre dans sa vie Jérôme (Vincent Macaigne), déséquilibré qui lui étale ses problèmes sentimentaux, manque accidentellement de le tuer et vient même squatter son canapé pour une durée indéterminée.
La réussite de cette dramédie tient à une définition fine et équivoque de son personnage, finesse à la suite de laquelle tout le ton du film se trouve pareillement soumis à de subtils échanges entre vivacité et onirisme, indulgence et discipline, rire et pauses méditatives : Damiens n’incarne ni le gros réac de service, ni le papounet toujours à l’ouest, mais plutôt une sorte de regular joe que le film ne prive pas de sa capacité d’action.
Flottement lunaire
C’est dans le plein exercice de son autorité paternelle et professionnelle que Philippe compose avec l’improbable détraquement généralisé qui s’abat sur sa vie, d’où un film qui de scène en scène réajuste l’équilibre moral de son héros sans jamais vraiment faire table rase de ses bonnes mœurs périurbaines, son rapport à l’ordre, à l’éducation.
A cette précision de l’écriture, il faut ajouter l’humeur onirique du film, plongé dans une sorte de spleen citadin, de rêverie – voir le titre. Flottement lunaire qui n’avait peut-être pas besoin de se concrétiser en séquences de rêve et costumes de cosmonaute (un peu de trop), mais qui offre néanmoins à François Damiens une partition comme un écrin idéal de cet instant de sa carrière.
Entre son aspiration à des rôles moins clownesques et un passif de bouffon qu’il ne s’oblige pas totalement à renier, l’acteur joue impeccablement cet état médusé de l’être, ce désamarrage impromptu à sa propre vie dont le film a fait son sujet.
Des nouvelles de la planète Mars de Dominik Moll (Fr., 2015, 1 h 41)
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