Repéré l’an passé sur les inRocKs lab, le Français Adam Naas a pris le temps de développer une soul épurée, portée par une voix très supérieure, qu’on entendra sur un ep à la rentrée.
Il y a plus d’un an, écoutant les récentes inscriptions sur notre site les inRocKs lab, on découvrait un nouveau venu : Adam Naas. Et sa seule chanson postée : Fading away. La claque fut telle qu’on lui envoya un message l’enjoignant de s’inscrire à notre concours annuel, en le suppliant de fournir plus de chansons. La réponse nous parvint, en anglais, d’un manager bien embêté. Adam Naas ne possédait alors qu’une chanson, n’avait ni musiciens, ni site internet, ni page Soundcloud. Il avait pourtant l’essentiel : une chanson divine qui allait défier les gardes-frontières de la soul, de la pop, de l’electro comateuse de James Blake ou The xx.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
On soupçonne le Français d’avoir pris peur face à notre enthousiasme bruyant, venu troubler la sérénité d’une musique de peu de choses, réduite à un murmure d’orgue, des beats épars et un chant imposant sous ses airs plaintifs. On pensa immédiatement à Portishead pour cette épure d’énormité. Depuis, Adam Naas a composé d’autres chansons et signé un contrat avec une major.
“J’ai longtemps hésité, j’ai vu aussi des labels indépendants. Mais ils me tenaient un discours que j’aurais plutôt attendu d’une major, et vice versa. A l’époque des inRocKs lab, je n’étais pas prêt, je voulais encore me découvrir.”
« Ecouter les autres me donne du courage »
Aujourd’hui encore, tout n’est pas en place entre les plaques tectoniques sur lesquelles repose, en équilibre instable, la musique d’Adam Naas. Il faudra un peu de temps pour que ses chansons trouvent une forme définitive. Mais la personnalité, déjà, éblouit.
“Je me construis encore, j’écoute de la musique en permanence, par besoin. C’est souvent intimidant, mais j’ai l’arrogance de penser que je suis à la hauteur. Ecouter les autres me donne du courage. Je n’analyse rien, mon approche de la musique est très basique : j’aime ou j’aime pas. J’ai traversé plusieurs phases, hip-hop, electro, soul, funk ou indie, avec des voix bouleversantes comme Chris Garneau. Aujourd’hui, dans ma tête tout se mélange. La seule constante, c’est l’amour des belles voix, intimes.”
Avant de chanter, il y a eu pour Adam Naas un long apprentissage de la musique. A 13 ans, pour les 18 ans de son frère, il lui offre une guitare, la récupère, se lance sans leçons, sans cours de chant. Lassé de la guitare volée, il se penche alors vers les claviers, le piano notamment. Et ça marche : ce sont eux qui donnent à sa voix, hésitante dans la conversation, sa fluidité.
“C’est par le chant que je parviens à m’exprimer. C’est ma façon naturelle de parler. Même si j’ai cru que j’allais mourir la première fois que je suis monté sur scène, l’an dernier.”
Un goût prononcé pour la fainéantise
Une phobie oubliée, qui laisse la place à une suavité, une sensualité de crooner du murmure, qui ordonne les frottements et humidités. Il a mis en scène ses fantasmes de musiques de la chair en complicité avec le producteur Reimann, “car je ne sais pas comment fonctionne un studio, un ordinateur. Le studio m’intéresse peu, je voudrais tout achever en une prise de voix. La technologie me déprime.” Il avoue un goût prononcé pour la fainéantise. Une nonchalance qu’il remise quand il s’agit d’écrire, toujours en anglais. “C’était ma matière de prédilection. Je suis certain d’être la réincarnation d’une prostituée britannique.”
A ses débuts, Adam Naas a failli s’appeler L’Aigle Noir, en hommage à Barbara, une obsession : “Elle me fait chialer comme une petite merde.” Ou Le Corbeau.
“Dans la mythologie grecque, les corbeaux étaient tout blancs, majestueux, sages, ils livraient les nouvelles. Mais ils ont contrarié Apollon, qui les a teints en noir. Gamin, je voulais en domestiquer un.”
La musique d’Adam Naas est aujourd’hui noire, majestueuse et peu domestiquée.
{"type":"Banniere-Basse"}