Le quotidien d’un vieux couple rural des années 70 filmé avec une méticulosité fascinante.
Un documentaire extraordinaire de 1972, qui contrevient aux conventions du genre. C’est sans doute pour cela que cet unique long métrage de Dominique Benicheti (1943-2011), cinéaste féru de recherche technique, était resté inédit. On pourrait l’assimiler aux Profils paysans de Depardon, ultimes témoignages sur l’agriculture ancestrale, mais, même si le contexte est comparable, la démarche diffère.
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D’abord on n’entend presque pas une parole dans Le Cousin Jules. Ensuite, il n’y a pas de problématique, comme on dit dans les facs d’aujourd’hui.
On assiste à la simple journée de deux octogénaires, un forgeron de Bourgogne et sa femme. Quotidien ritualisé mais sans événements particuliers. On vit encore comme au XIXe siècle. Seuls signes de modernité : l’électricité et un véhicule à moteur.
Les artifices du tournage produisent un agrandissement du réel
Ce documentaire tourné en scope comme un western ressemble à une fiction par sa mise en scène, son découpage, ses raccords (rares dans
un documentaire). N’empêche, la magie opère. Les artifices du tournage produisent un agrandissement du réel ; on est happé par le moindre détail. On remarque les trop larges épluchures de pommes de terre de la vieille dame, ou la manie de son mari forgeron de laisser rebondir son marteau sur l’enclume après avoir martelé un morceau de métal rougi. La simple séquence du café préparé par la vieille femme dans l’atelier de son mari prend une ampleur fabuleuse.
Cela tient certes aux archaïsmes pittoresques de la situation (puisage de l’eau, mouture manuelle du café) mais aussi à la décomposition des gestes, à leur grâce. Sans parler de la connivence tacite des époux. Antithèse d’un cinéma américain cherchant sans cesse à excéder le réel par l’imagerie, Le Cousin Jules atteint une forme de nirvana en s’appesantissant sur la banalité du quotidien.
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