L’Américain Tom Krell revient avec un nouvel album moins bizarre mais toujours intime et chic.
Certains feraient bien de s’en inspirer. Parce que c’est bien mignon de vouloir élargir son public, amorcer un changement d’échelle, en gros vouloir être “plus pop”, mais si c’est pour entrer dans les cases normalisées du mainstream sans saveur, ce n’est pas la peine. Tom Krell, lui, réussit parfaitement son “virage pop” avec Care, le quatrième album de son projet How To Dress Well.
Dessus, il met de côté les déraillements sonores de son r’n’b mutant et sophistiqué, mais justement sans mettre cette sophistication de côté. Le son est simplement plus produit (l’album a été mixé par Andrew Dawson, un habitué du hip-hop US) et l’ambition élevée d’un cran. Il y a donc moins de silences dans les voix, moins de tempêtes sonores dans les prods et moins de collages hors cadre entre les deux. Mais Krell ne perd jamais de vue ce qui compte vraiment : la singularité de son écriture.
Dans ces nouvelles chansons, le monde continue de s’écrouler et les individus disparaissent toujours dans les recoins de la mémoire. En gros, c’est toujours aussi mélancolique et délicat. Le changement réel vient plutôt de ce qu’il y a autour de chaque chanson en tant que pièce écrite. Les mélodies, les arrangements, la texture du son : tout ça évolue au profit de quelque chose de plus lisse, certes, mais jamais de plus simple ni de plus bête.
Avec des morceaux comme le single Lost Youth/Lost You, How To Dress Well se place même au niveau tubesque d’un Blood Orange, autre projet sachant manier la finesse tout en flattant l’oreille. Même schéma avec un titre comme Anxious, un truc assez up tempo, presque joyeux, qui, venant de Krell, fait quasiment office d’expérimentation. Et tisse, au passage, une filiation bizarre allant de Michael Jackson à Justin Bieber en passant par Drake. Du r’n’b toujours mutant, donc.
Concert le 10 novembre à Paris (Point Ephémère)