Une épatante épopée pop sur la Grèce : la parodie, dernier espace de liberté.
Avec quatre films à ce jour, Panos H. Koutras invente de nouvelles manières
de délirer son pays, la Grèce, qui n’aura pas été dans l’histoire de l’humanité celui qui aura le moins subi ce genre de traitement. De l’humanité : le mot s’écrit tout seul, et la Grèce continue de nous renvoyer à l’idée d’histoire universelle, où l’image de la pensée occidentale et la crise économique, origine et fin, seraient les deux faces d’une monnaie où l’imaginaire européen voit reflété son destin incertain.
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Panos H. Koutras, loin de s’en défaire, mobilise à chaque coup l’imaginaire national de son pays, chargé du poids allégorique d’une civilisation, en suivant une méthode d’exagération systématique. Chaque film prend sur lui les signes contemporains, visibles, d’une tradition mythique qui ne s’épuise pas, le cinéaste affirmant que “la mythologie relève de la culture populaire plutôt que d’un art noble réservé à un petit groupe”, pour mieux montrer que la culture populaire continue la mythologie.
L’Attaque de la moussaka géante, La Vie véritable et Strella avaient pour programme fauché de reprendre Sophocle et Virgile par les formes respectives du film d’horreur, du feuilleton télé et du cinéma-d’auteur-international. Xenia est une épopée homérique sous forme de film gay dans la Grèce xénophobe d’aujourd’hui. Par ce programme pop si clair, comme une formule, le film se libère immédiatement de tout ce qu’il pouvait arborer de fétichisme ou de bêtise : c’est un film épique, et c’est parti.
On traverse avec deux jeunes frères, fils d’une chanteuse albanaise immigrée, le chemin d’Athènes à Thessalonique : d’une part à la recherche d’un hypothétique père biologique devenu politicien d’extrême droite, d’autre part pour participer à une émission de téléréalité élisant la nouvelle star de la chanson. La déesse qui veille sur leur voyage est la chanteuse italienne Patty Pravo, maternelle idole sans crépuscule invoquée par ces rites sacrificiels que sont les chorégraphies du début des années 70.
Les deux héros rencontrent divers obstacles et alliés mus par les forces surhumaines du néofascisme, ducapitalisme en ruine, du sexe adolescent et de la nuit disco. Sur l’air séduisant d’une “nouvelle odyssée grecque”, Xenia accomplit fièrement son programme : trouver par le délire parodique le noyau de sentiments purs, d’émotions libres, qui est le dernier moteur de notre vie en milieu merdique et la vérité de la culture populaire humaine “depuis Homère”. Moteur épique d’une jeunesse possible au sein de la fiction universelle.
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