Non seulement Mulan a été tourné dans une province chinoise où se trouvent des camps d’internement de Ouïghours, mais la production a remercié la région de Xinjiang au générique…
Les soutiens de la minorité musulmane ouïghoure – massivement incarcérée par le gouvernement chinois – sont révoltés par le blockbuster américain. Non seulement Mulan a été partiellement tourné dans la région où les Ouïghours survivent dans des camps d’internement, mais la production n’a pas manqué de remercier la province en question pour les avoir accueillis. Lors de la sortie du film en Chine début septembre, le militant hongkongais Joshua Wong avait immédiatement repéré ces remerciements adressés à la province de Xinjiang en générique de fin…. Un geste symbolique qui, selon lui, est intolérable.
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Décidément, la version en prises de vues réelles du dessin animé de notre enfance accumule les scandales. Dès 2019, des internautes chinois ont appelé à boycotter le film en raison d’un post controversé de l’actrice principale – Liu Yifei – sur le réseau social Weibo. Elle y déclarait sans nuance son soutien à la police hongkongaise qui réprime les manifestations anti-gouvernementales : « Je soutiens la police de Hong Kong ; vous pouvez me frapper maintenant […] quelle honte pour Hong Kong ». Et Joshua Wong était parmi les premiers à crier au scandale.
It just keeps getting worse! Now, when you watch #Mulan, not only are you turning a blind eye to police brutality and racial injustice (due to what the lead actors stand for), you're also potentially complicit in the mass incarceration of Muslim Uyghurs. #BoycottMulan https://t.co/dAMgZ6PWTD
— Joshua Wong 黃之鋒 😷 (@joshuawongcf) September 7, 2020
« Cela ne fait que s’aggraver ! Maintenant, lorsque vous regardez Mulan, non seulement vous détournez les yeux des violences policières et des discriminations raciales (étant donné ce que les acteurs principaux soutiennent), mais vous êtes potentiellement complices de l’incarcération massive des musulmans ouïghours. #BoycottMulan »
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Une logique économique
Dans un article du 4 décembre, France Info a interrogé Dihur Reyan, la présidente de l’Institut ouïghour d’Europe. Et son point de vue est très clair : bien que le tournage dans la province de Xinjiang n’ait duré que quatre jours (pour une séquence de 78 secondes), l’équipe a forcément croisé ces « centres de formation » de la population ouïghoure :
« Pour arriver depuis l’aéroport de Turpan jusqu’au lieu de tournage, ils passent clairement par des camps de concentration. Il y en a au moins sept, donc il est impossible qu’ils ne les voient pas. Et en plus de ça, ils remercient ces monstres qui enferment, qui torturent des millions de personnes ».
Selon la spécialiste de la Chine, Marie Holzman, cette polémique est le signe d’une évolution générale du rapport de force international : « C’est un peu le drame de l’Occident contre le pouvoir totalitaire. Petit à petit, nos valeurs sont érodées par ça. » En effet, Disney a manifestement privilégié ses propres intérêts économiques. Mulan est un produit conçu pour plaire à l’audience chinoise (dont le poids vaut tous·tes les spectateur·rices de l’Occident), avec des comédien·nes connu·es uniquement du public chinois.
La société de production se défend en arguant que la région de Xinjiang a été choisie « par souci d’authenticité avec la légende de Mulan ». Et Disney nie également toute responsabilité concernant ce problématique générique de fin : « la liste des remerciements a été définie par la société chinoise partenaire qui a organisé le tournage. »
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