L’autre nouvelle “console” de cette fin d’année est un casque de réalité virtuelle qui pourrait bien tout changer : simple à utiliser, plus léger, moins cher et déjà pourvu de quelques jeux excellents. Et aussi : le minimalisme entêtant de Crazy BMX World, le bel esprit série B de Serious Sam Collection et Spirit of the North plus beau que jamais sur PS5.
Quand le chien se met à aboyer, vous n’en menez pas large. Vite, vous vous tournez pour regarder dans la même direction que lui et essayer de comprendre ce qui le met dans cet état. Dans la forêt, dans la nuit, vous ne distinguez pas grand-chose. Un mouvement, à peine une ombre derrière les arbres. Un frisson glacé vous parcourt tout le corps.
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A la base, Blair Witch, développé par le studio polonais Bloober Team et pensé comme un prequel du film Le Projet Blair Witch, est un jeu d’épouvante astucieux (par son usage des cassettes vidéo trouvées qui “transforment” le réel) et plutôt bon sorti sur PC, Xbox One et PS4 l’an dernier et plus récemment sur Switch. Mais, en cette fin d’année 2020, l’aventure prend une tout autre dimension et se vit beaucoup plus intensément. En réalité virtuelle, avec un casque sur la tête. Mais pas n’importe quel casque.
VR de compagnie
Avant la PlayStation 5 et les Xbox Series S et X, ce fut la première nouvelle “console” de jeu de l’automne : l’Oculus Quest 2, évolution du premier du nom sorti l’an dernier (et, avant lui, de l’Oculus Go) qui pourrait bien être une étape déterminante dans la démocratisation de la réalité virtuelle. Par rapport à son prédécesseur, l’Oculus Quest 2 fait à peu près tout mieux. Il propose une meilleure définition d’images, se révèle plus léger (ce qui est toujours une bonne nouvelle pour un appareil qu’on se colle sur la tête) et, ce qui ne gâte rien, voit son prix baisser jusqu’à 350€ pour le modèle de base, soit à peine cinquante euros de plus que ceux d’une Switch ou d’une Xbox Series S.
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Mais si le nouveau casque commercialisé par la filiale de Facebook (chez qui il est obligatoire de détenir un compte pour pouvoir l’utiliser) est aujourd’hui l’option la plus accessible en matière de réalité virtuelle, ce n’est pas qu’une affaire de prix mais, surtout, de mode d’utilisation. Là où, par exemple, le casque VR de la PlayStation 4 nécessite de connecter une caméra à sa console à laquelle l’appareil est relié par des câbles, l’Oculus Quest 2 se suffit à lui-même. Il n’y a qu’à l’enfiler et se saisir de ses deux manettes à détection de mouvements. L’objet quitte alors son mode veille, et c’est parti, on y est. Cette simplicité de mise en route, proche de celle que proposent les consoles portables, est une bénédiction pour la réalité virtuelle qui peut rapidement fatiguer et, donc, se prête plutôt aux expériences assez courtes qu’aux longues sessions. Débarrassé de toute cette lourdeur et de ce temps d’installation, l’Oculus Quest 2 fait ainsi émerger l’hypothèse d’une VR de compagnie, toujours disponible pour aller y faire un tour si le cœur nous en dit.
Et une fois casqué, on fait quoi ? On joue, on regarde des vidéos, on assiste éventuellement à des spectacles et on navigue sur Internet en quête d’expériences que ne propose pas la boutique en ligne de l’Oculus Quest 2. Car sa première limite est là : dans le nombre encore limité d’expériences, et notamment de jeux, spécifiquement conçus pour lui. Il est certes possible de relier le casque à un PC grâce au câble Oculus Link pour profiter des titres en VR disponibles notamment sur Steam, mais son prix (100€) comme les branchements font perdre un peu de sa spécificité à l’Oculus Quest 2. Il reste qu’en attendant de sauter éventuellement le pas et/ou d’accueillir certains gros jeux d’ores et déjà annoncés, comme des épisodes inédits d’Assassin’s Creed ou de Splinter Cell, il y a quand même déjà de quoi faire sur l’Oculus Quest 2.
Indémodable Rez
D’abord, on y trouve bon nombre de titres qui ont fait la réputation du jeu en réalité virtuelle ces dernières années comme Beat Saber, Superhot, Job Simulator (et sa variante Vacation Simulator, particulièrement bienvenue en période de confinement) ou encore Moss. Mais, en matière de “réchauffé”, la meilleure nouvelle de l’automne pourrait bien être l’arrivée sur l’Oculus Quest 2 de Rez Infinite, la sublime version en réalité virtuelle de l’indémodable jeu de Tetsuya Mizuguchi déjà disponible sur d’autres supports et qui, avec son esprit arcade, profite pleinement d’une machine adaptée aux parties rapides. Avec le tout aussi brillant Tetris Effect de Mizuguchi qui est lui aussi disponible sur l’Oculus Quest 2 (et qui, sans la VR, vient d’arriver sur les Xbox), Rez Infinite est sans doute toujours la meilleure raison de se mettre à la réalité virtuelle. Il n’est d’ailleurs pas impossible que ces deux chefs-d’œuvre du jeu vidéo aient fini par trouver en l’Oculus Quest 2 leur plateforme idéale.
Sur un mode plus mineur, le jeu de tir Arizona Sunshine, gros succès du jeu en VR depuis son arrivée sur PC il y a déjà quatre ans, démontre bien ce que la réalité virtuelle, et plus précisément un casque léger et facile à utiliser, peut apporter au jeu vidéo. Sorte d’héritier humoristique et vaguement kitsch de la saga House of the Dead, Arizona Sunshine nous confronte à des vagues de zombies que nous n’avons d’autre choix que d’abattre un à un alors qu’ils s’approchent de nous. Comme avec Blair Witch, la VR apporte une dimension physique à la fois exaltante et presque douloureuse à l’expérience, comme pour un retour au jeu forain. Ici, c’est un stand de tir augmenté, un espace de danger dans lequel nous sommes brusquement projetés. Un espace, néanmoins, précisément délimité car, lors de sa première utilisation (et à nouveau par la suite en cas de besoin), l’Oculus Quest 2 a la particularité de nous faire “dessiner” notre zone de jeu en utilisant l’une de ses manettes en fonction de la place dont on dispose dans la pièce, pour éviter toute collision avec les meubles, sachant qu’à chaque fois que l’on s’en approchera, sa frontière apparaîtra à l’image. C’est notre îlot de fiction, un endroit rien qu’à nous, cohérent et précieux.
Sorcières et shamans
La nature foraine de la VR crève les yeux (presque littéralement, si on les pratique trop longtemps) dans plusieurs autres jeux qui ont accompagné le lancement de l’Oculus Quest 2. C’est le cas du réjouissant Little Witch Academia : VR Broom Racing, dernier jeu en date dérivé d’une fameuse franchise manga sur une école de sorcières qui nous invite à nous lancer dans une série palpitante de courses en balai volant (que l’on ne manquera pas de customiser pour accroitre ses performances au fil de nos succès). Les couleurs claquent, les demoiselles aux chapeaux pointus surjouent joyeusement leurs saynètes de comédies pendant qu’on regarde à droite, à gauche, derrière et au-dessous de nous, pour admirer les champignons géants avant de relever le défi suivant, avec l’estomac qui s’agite d’une manière pas du tout virtuelle dans les virages un peu secs. Ces montagnes russes psychédéliques perpétuellement à notre disposition sont un joli plaidoyer pour l’avenir de la VR.
On pourrait dire à peu près la même chose de Star Shaman avec son style graphique et ses créatures (oh, un papillon bleu géant…) tout aussi stupéfiants. Dans ce jeu de type Rogue-like du petit parisien Ikimasho, nous sommes une sorte de sorcier de l’espace qui parcourt les galaxies pour ramener les planètes à la vie. Là aussi, l’expérience est physique : on attrape un cristal, on le tire, on récupère des munitions et puis on vise les méchants trucs qui font du mal à la vie. C’est une expérience quasi dansée autant qu’un spectacle sidérant dont on se trouve être à la fois le public et le ou la principal·e interprète.
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Bulles d’espace-temps
Et pour finir ce tour d’horizon forcément très partiel, pourquoi ne pas prendre des nouvelles de l’irrésistible vocaloïde Hatsune Miku ? Sur Oculus Quest 2, elle est au centre d’un jeu musical qui se pratique en “attrapant” les notes qui se dirigent vers nous, dans une variante des rhythm games classiques qui ne mobilise pas seulement les doigts mais les bras entiers. Ce qui, à la longue, se révèle très (très) fatigant. D’où notre soulagement en découvrant qu’Hatsune Miku VR dispose aussi d’un mode concert dans lequel, à l’image du volet de ses aventures musicales disponible sur le PlayStation VR, notre seule activité consistera à nous déplacer d’un point à un autre afin de choisir le meilleur angle pour admirer la star.
Un trip, encore, comme pour beaucoup d’autres jeux pensés pour la réalité virtuelle. Ou peut-être pas exactement un trip, pas un voyage, car la VR nous met moins à proprement parler en mouvement qu’elle ne nous propulse dans des bulles éphémères à habiter librement, avec le sentiment troublant d’appartenir à cet espace-temps. C’est son don, sa révélation. “We embark on this ride to find out who we are. We look up to the sky to find out who we are”, peut-on entendre dans la chanson qui accompagne l’un des niveaux les plus mémorables de Tetris Effect. “Nous nous embarquons dans cette balade pour découvrir qui nous sommes. Nous levons les yeux vers le ciel pour découvrir qui nous sommes.” Le jeu avec l’Oculus Quest 2, ça doit être quelque chose comme ça.
Oculus Quest 2, environ 350€ (6 Go de stockage) ou 450€ (256 Go). Blair Witch (Bloober Team), 30€ ; Rez Infinite (Monstars Inc. / Resonair / Enhance), 20€ ; Tetris Effect (Monstars Inc. / Resonair / Enhance), 30€ ; Arizona Sunshine (Vertigo Games), 40€ ; Little Witch Academia : VR Broom Racing (UNIVRS, Inc.), 30€ ; Star Shaman (Ikimasho), 20€ ; Hatsune Miku VR (Crypton Future Media / Degica), 25€.
Et aussi :
Crazy BMX World
Il n’y a pas que la réalité virtuelle, la 4K et les (très) hautes technologies dans la vie. Simple, basique et néanmoins follement prenant, Crazy BMX World (aka Bike Rider DX au Japon) prouve qu’on peut encore aller loin en se laissant porter par une seule idée. Un bouton suffit ici pour faire sauter notre petit vélo au-dessus des gouffres qui parsèment les 295 niveaux de cette épopée minimaliste autour du monde, qui nous fait aussi voyager dans l’espace et dans le passé. Tous les runners ne se valent pas (ces jeux dans lesquels le personnage avance tout seul) : ce qui fait la différence, c’est le level design et l’ambiance. En la matière et comme Alto’s Adventure dans un autre esprit, Crazy BMX World est joliment réussi.
Sur Switch, Spicysoft / Hy / Shinyuden, 3€
Serious Sam Collection
Serious Sam est, depuis 2001, le jeu vidéo de série B dans toute sa splendeur : un jeu de tir en vue subjective moqueur et facétieux, qui se moque bien des modes et va chercher son inspiration directement chez les ancêtres du genre FPS (First-person shooter), Doom et Quake – on parle aujourd’hui de “Fast FPS”. Quelques mois après l’arrivée de Serious Sam 4, cette anthologie rassemble trois épisodes de la saga du studio croate Croteam accompagnés de leurs extensions. Si Serious Sam 3 est plus discutable (et bancal techniquement, en tout cas sur Switch), on ne se lasse pas de la première aventure de notre musculeux héros qui le voit combattre des extra-terrestres dans l’Egypte antique.
Sur Switch, PS4, PS5, Xbox One, Xbox Series S/X et Stadia, Croteam / Devolver Digital, environ 30€
Spirit of the North – Enhanced Edition
On a déjà dit ici tout le bien que l’on pense de Spirit of the North, qui nous fait traverser un monde superbe et mystérieux aux paysages inspirés de l’Islande en compagnie d’un petit renard. Retravaillé graphiquement pour profiter des capacités de la PlayStation 5 et notamment de son affichage 4K, car il n’y a pas de raison que ce type de traitement, auquel se soumettent un à un les blockbusters, soit interdit aux jeux indépendants. Somptueux, le résultat donne une folle envie de repartir pour le Grand Nord.
Sur PS5, Infuse Studio / Merge Games, environ 35€
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