La marque parisienne Koché s’est récemment envolée pour le Japon, pour la fashion week de Tokyo. L’occasion pour la marque de tourner un nouveau film, “Wandering High”, signé Kevin Elamrani-Lince. Nous l’avons rencontré afin de discuter de son approche artistique mais aussi de l’avenir des films de mode.
C’est à l’occasion de la fashion week de Tokyo, au Japon, que Koché a signé sa nouvelle réalisation, esthétiquement plus proche d’un film d’auteur que d’un film de mode. Wandering High, tourné en backstages du show tokyoïte de la marque parisienne en mars 2019, met en avant les corps et visages des mannequins et protagonistes faisant partie de l’ADN de Koché. Mais pas que : cette réalisation signée Kevin Elamrani-Lince fait aussi subtilement passer le spectateur de l’autre côté du rideau.
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Grâce à des plans précis et ralentis mettant en scène la créatrice de Koché, Christelle Kocher, en train de faire des dernières retouches avant le show, Elamrani-Lince rappelle intelligemment le travail et le savoir-faire nécessaires à la construction d’une collection. Depuis plusieurs années, la marque tente en effet de réinventer la façon de filmer les vêtements, les corps et le processus créatif, et ce, à travers un travail collaboratif entre Krampf, artiste numérique, Julien Lacroix, directeur artistique, et bien sûr Christelle Kocher et Kevin Elamrani-Lince. Rencontre.
Comment êtes-vous arrivé à cette esthétique quasi cinématographique pour votre film, lequel est assez atypique par rapport aux films de mode classiques ?
Kevin Elamrani-Lince – Je crois que c’est simplement mon style, ma manière de filmer, et la façon dont je raconte des histoires par les images. Et ce, quelque soit la nature du film. Ma démarche est à la fois réfléchie et intuitive, et, avec Christelle [Kocher], je retrouve complètement la même manière de collaborer qu’avec des musiciens sur un vidéoclip, par exemple. Cette nature collaborative est importante, elle me donne un cadre, et si je trouve une vraie liberté dans celui-ci, alors je peux m’exprimer pleinement. C’est donc un dialogue à plusieurs : Krampf et Julien Lacroix sont essentiels et travaillent avec nous dans l’approche polymorphe de nos films.
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Pensez-vous que cette approche marque un tournant pour le film de mode ? Voire la chute de l’une des dernières barrières entre la mode et les autres arts (le cinéma en l’occurrence) ?
Un tournant je ne pense pas, un passage ou un pont, oui, peut être… J’essaye de transférer et d’harmoniser certains vocabulaires, que ce soit ceux de la mode, de la musique ou du cinéma, à travers une forme visuelle hybride qui veut créer une émotion particulière, un peu de beauté et de sens. La mode est, au même titre que le cinéma, une industrie, ce qui les rapproche sur les questions de production. Mais dans mon cas, mon inspiration est plus esthétique qu’industrielle, car je fais très souvent les choses avec de modestes moyens. Ce n’est pas un désir absolu mais le prix d’une forme d’indépendance, et j’y tiens. Et je crois que Christelle aussi.
Comment avez-vous travaillé avec Christelle sur ce projet, l’idée venait-elle de vous ou d’elle ? D’une collaboration construite à deux ?
Il y a un univers commun évident entre nous deux depuis le départ, ce que je ne m’explique pas forcément. Et cela se reflète dans les nombreux films que l’on a faits ensemble, certains étant quasi improvisés quand d’autres plus construits : A Sudden Blow, Invisible Water, le film de la collection avec le PSG… A chaque fois, il y a une forme de confiance et d’espace pour dialoguer à travers nos gestes créatifs respectifs.
Avec Christelle, nous partons d’univers, de lieux que nous apprécions, de visages, de personnalités, de musiciens qui nous touchent… Je conçois les films généralement de manière artisanale, même si c’est parfois plus produit. Mais j’essaye de garder ce socle commun de féerie. Et je crois que cela nous motive tous les deux, de garder un peu de magie dans ce que l’on fait.
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Vous inspirez-vous d’abord des collections, ou bien des corps et visages des mannequins aux physiques caractéristiques de Koché ?
Oui bien sûr, Koché a une histoire forte avec ses castings, qui sont souvent des personnalités inspirantes et attachantes. Cela donne envie de les filmer. Marissa Seraphin, par exemple, est présente dans tous les films : elle traverse tous ces univers comme une sorte de fée contemporaine. J’aime bien la filmer dans différentes villes, différents contextes.
Pensez-vous que le film de mode peut devenir une discipline proprement artistique ?
Je ne sais pas. Je pense qu’il y a des films qui sont porteurs de sens, qui ont une valeur cinématographique ou artistique, et d’autres moins… Et ce, peu importe la discipline.
Propos recueillis par Pauline Malier
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