L’itinéraire amoureux et professionnel de deux mid-vingtenaires attachants, doublé d’une intéressante réflexion sur le cinéma.
Martin et Léa viennent de se séparer. Ils montent chacun à Paris pour construire leur vie respective. Pour elle, c’est l’histoire ; pour lui, le cinéma. Mais au-delà des rêves de carrière, l’amour ressurgit. Elle aimait un jeune de son âge, elle va aimer un vieux. Il aimait une femme, il va aimer un homme.Pour filmer cette jeunesse, Michaël Dacheux a la belle intuition de faire de son sujet l’entre-deux plutôt que l’initiation. Avoir 25 ans, c’est faire l’expérience de cette petite béance, c’est être écartelé entre deux territoires, pas encore tout à fait adulte, mais plus tout à fait autre chose non plus. Avoir 25 ans, c’est donc un gouffre mais c’est aussi la promesse d’être en devenir. C’est aussi s’extraire d’une certaine norme pour glisser vers ses désirs. Une sortie de route symbolisée par les deux nouveaux couples que formeront respectivement Léa et Martin.
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Ce voyage vers un inconnu géographique, professionnel, amoureux et sexuel est déployé dans le film avec un certain romantisme hérité de Jean Eustache, dont le spectre rejaillit décidément avec force sur le cinéma français ces derniers temps, après Mes provinciales de Jean-Paul Civeyrac sorti l’année dernière. Au-delà de la simple citation, le film revendique frontalement cet héritage, à l’image d’une scène où Martin assiste à une projection à La Cinémathèque de La Maman et la Putain présentée par son actrice principale, Françoise Lebrun, qui s’invitera par la suite dans le récit du film, devenant un de ses personnages.
Dans sa seconde moitié, le film se teinte d’autoréflexivité et se propose de repenser, d’élargir et de complexifier ce qui définit un cinéaste. Autour de l’apprenti Martin – celui qui veut créer des images – gravitent en effet deux hommes de cinéma : le professeur et le critique. Placés en retrait, chacun à un pôle opposé de la production d’images, le premier aide à les façonner avant (« aider les autres à se réaliser », déclare-t-il), tandis que le second les réceptionne et les commente après. Mais ces deux figures sont -elles pour autant cinéastes? Au fond, le cinéaste est-il exclusivement le créateur des images ou bien, plus largement, est-ce aussi celui qui éduque un regard, celui qui l’étudie ? La richesse de L’Amour debout tient dans cette forme composite qui fait autant de lui un film charmant sur la jeunesse et l’amour qu’un objet plus théorique réfléchissant sur son propre art .
L’amour debout (Fr, 2019, 1h23)
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