Une tentative de variation lynchienne bien loin des ambitions de son modèle.
« Bordel, où es-tu ? » implore la mère dévastée. Le mystère est entier et il ne sera pas élucidé. La petite Carolyn, poupée américaine type, a rejoint le cercle des disparitions impossibles à résoudre, enfermée à double tour dans les limbes d’un cinéma américain gouverné par le Blue Velvet de David Lynch. C’est d’ailleurs dans le même pays que celui bâti par le créateur de Twin Peaks qu’emménage Knives and Skin, un pays-bonbonnière avec ses intérieurs douillets et irrespirables, ses tromperies et ses non-dits toxiques, ses ados lucides et ses adultes détraqués.
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La disparition de la blonde n’est qu’un prétexte pour pénétrer dans l’upside down d’une petite ville « paisible » et en déterrer les cadavres. Traversé d’innombrables influences, mariant le spleen adolescent d’un 13 Reasons Why au rouge sang du giallo, ce deuxième long métrage fait l’effet, d’abord plutôt séduisant, d’une boule à facettes ultra-référencée. Mais, passé l’électrisant Girls Just Want to Have Fun de Cyndi Lauper et les garde-robes vintage des lycéens, les lumières chatoyantes du début se changent en voyants lumineux fixant les contours d’un scénario pas tellement bizarroïde.
En surchargeant son récit de marqueurs contemporains anecdotiques (notamment une histoire d’amour lesbienne ici totalement accessoire), Knives and Skin, film choral porté par un élan de sororité évident, oublie pourtant l’essentiel : regarder ses personnages comme des individus pour que leurs peaux, menacées par les lames d’un couteau, arrachent enfin leur enveloppe glacée.
Knives and Skin de Jennifer Reeder avec Marika Engelhardt, Raven Whitley, Tim Hopper (E.-U., 2019, 1h52)
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