La nouvelle saison de This Is Us s’ouvre sur trois épisodes magistraux qui intègrent port du masque, pandémie et problématiques raciales toujours persistantes. Un tour de force qui semble écrit en live tout en se jouant des temporalités. Vivement la suite !
Le retour d’une série qui met le “nous” au centre du jeu ne peut que faire du bien aujourd’hui. Il n’en existe pas d’autre à la hauteur de This Is Us en termes de popularité et de sophistication, aucune qui ne travaille à ce point l’idée d’un destin commun, d’un lien social à scruter coûte que coûte. Même quand il est mis en danger. Surtout quand il est mis en danger. Dans les trois premiers épisodes de la cinquième saison, diffusés la semaine dernière, ce sentiment de toucher le monde tel qu’il va mal se révélait très puissant, donnant à la série de Dan Fogelman une nouvelle peau, une pertinence décuplée.
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Le plus beau, c’est que rien n’a changé, ou presque. Il est toujours question de trois enfants né·es le même jour, Randall, Kevin et Kate, de cette famille Pearson saisie sur plusieurs décennies, dans un entrelacs de temporalités qui se parlent comme si elles se connaissaient, sans la couture des effets de flashback. Passé et présent se mêlent et dansent ensemble : tel est le principe de This Is Us, que l’on pourrait trouver forcé au bout de quatre saisons pleines, mais qui ne cesse en réalité de mettre en lumière les capacités de renouvellement de la série.
https://www.youtube.com/watch?v=h2mKG3gwGl8
La distance comme sujet de fiction
Pour cela, le principe de base de la fabrication à l’ancienne des séries US de grandes chaînes aide à la réactivité. Il n’est pas question d’attendre que tous les scénarios soient prêts pour entamer le tournage d’une saison : dans les salles d’écriture hollywoodiennes, tout se fait en direct et en flux tendu pour permettre une diffusion au fil de l’année. Cela peut donner des soaps, les Plus belle la vie locaux. Cela donne aussi ce genre de beautés.
Cette année, on imagine le pool de scénaristes de This Is Us forcé de travailler à distance ou en réduisant les contacts, décidant en toute logique de faire de cette distance le sujet de la fiction. Au premier degré, d’abord, puisqu’il est frontalement question de la pandémie de coronavirus dès les premières scènes du premier épisode.
Dans les lignes narratives situées au présent, Kevin porte un masque comme ensuite toute sa famille. Les Pearson sont comme les autres : ils ne peuvent pas se faire de câlins – sauf un “air hug” très bien maîtrisé par Kate –, ils se placent en quarantaine avant de se voir, ils s’annoncent de grandes nouvelles (un bébé, voire deux) sans se toucher. Même de ce point de vue, la série semble capter en douceur l’air du temps.
L’actualité bouscule le récit d’une façon magistrale
C’est comme si le changement de discours radical vis-à-vis du masque et des gestes barrières du futur locataire de la Maison Blanche Joe Biden avait été anticipé, la série partageant avec lui le même désir de pédagogie et de soin. L’impact d’une fiction reste évidemment difficile à mesurer, mais il n’est pas impossible que This Is Us contribue à une prise de conscience plus large.
Pour autant, elle n’est pas devenue une série de docteurs. Ce sont toujours des artistes qui la dirigent, comme le prouve le deuxième axe de ce début de saison 5, en parallèle à la pandémie. Alors que la majorité de la famille décide de se confiner dans une maison à la campagne, Randall refuse d’y aller. C’est pourtant son anniversaire et celui de son frère et de sa sœur, par ricochet – homme noir, il a été adopté le jour de leur naissance. Sauf que le problème se trouve peut-être là.
Quelques heures avant, Randall a vu la vidéo de George Floyd étouffé par la police, mort d’avoir eu la peau noire. Là encore, l’actualité bouscule le récit d’une façon magistrale. Ce n’est pas seulement la prise de conscience de son appartenance à une communauté opprimée qui percute Randall de plein fouet, mais la compréhension que, dans sa propre famille, la problématique a été largement sous-estimée.
Enfant noir adopté dans une famille blanche, Randall a été élevé dans un environnement bienveillant mais color blind, aveugle à la couleur de peau. Une intention a priori louable qui constitue aussi une forme de violence, tant le racisme systémique est nié : voilà une piste infinie qui s’ouvre pour la série. D’ailleurs, This Is Us est retournée dans ces trois épisodes à l’origine de son monde, le jour des accouchements, à l’hôpital. Comme si tout recommençait.
This Is Us saison 5 sur MyCanal
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