Dans un deuxième album fulgurant et évocateur, le jeune groupe parisien déterre et revoit les accents mélodiques d’un rock anglo-saxon nineties.
Le passage du temps implique parfois de sérieux malentendus, en particulier en termes de musique. En écoutant tous les chantres actuels du retour au son des années 1990, on aurait pu finir par croire que cette fameuse esthétique “slacker” n’était qu’une affaire de mollesse et de filtres colorés. Bryan’s Magic Tears reprend le flambeau exactement là où l’ont laissé des têtes de lard qui ont traumatisé une pelletée de journalistes et posé des acouphènes sur un paquet de tympans : Jay Mascis, Evan Dando, Kevin Shields ou Lawrence, soit les chantres d’un rock distordu sociopathe et d’un je-m’en-bas-les-couillisme puissant.
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Dream pop aux accents post-punk
Associé un temps à tort à un revival psyché périmé avant même d’avoir été mis au micro-ondes, le groupe parisien donne à entendre avec 4 AM une relecture du rock anglo-saxon mélodique, assez à l’aise pour défoncer les références qu’on lui collera (forcément) aux basques. Disque le plus adolescent de l’écurie Born Bad (à équidistance de Yussuf Jerusalem et Catholic Spray), 4 AM a des vrais moments de fulgurance : Slamino Day et sa dream pop aux accents post-punk ou Change et ses structures répétitives, pour n’en citer que deux. Si l’on excepte Sweet Jesus, interlude exotico lo-fi un peu hors sujet, ce deuxième album offre une suite compacte à l’album inaugural sorti en 2016 chez XVIII Records.
Moins fragile, peut-être moins touchant, 4 AM est un disque frontal au premier abord (frondeur même), mais qui se découvre au fur et à mesure des écoutes. Le groupe y alterne épure et mille-feuille de guitares avec une certaine forme de grâce et semble guidé par la simple envie de laisser vivre ses chansons, sans être (trop) crâneur. On pourrait évidemment vanter la démarche de défendre ce genre de musique en 2019, mais ce serait probablement réduire cet album à un exercice de style pour papas rockers et jeunots nostalgiques à côté de la plaque. Et c’est certainement le pire qui puisse arriver à ce groupe, qui réussit avec ce disque le pari d’une musique référencée et racée, assez personnelle pour (on l’espère) passer l’épreuve du temps et de la hype.
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