Les onze groupes de travail du Grenelle ont réfléchi pendant près de deux mois à des mesures permettant de lutter efficacement contre les féminicides et les violences conjugales. Ils présenteront leurs soixante propositions ce mardi 29 octobre.
Les soixante propositions pour lutter contre les féminicides et les violences conjugales, résultant du Grenelle organisé par la secrétaire d’État à l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, seront dévoilées ce mardi 29 octobre.
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Depuis le 3 septembre, onze groupes de travail, composés de représentants d’associations et de l’Etat, de proches de victimes, d’avocats ou encore de professionnels de santé se sont réunis autour de plusieurs thématiques dans le but de lutter plus efficacement contre les féminicides.
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Depuis le début de l’année 2019, 125 femmes ont déjà été tuées par leur compagnon ou leur ex. Pour améliorer la prise en charge de ces femmes et ainsi éviter les drames, les groupes de travail ont planché sur plusieurs thématiques : l’accueil en commissariat, les violences intrafamiliales, la justice, les violences psychologiques et emprise, les violences économiques…
Voici les propositions les plus marquantes qui émanent du Grenelle.
Mise en place d’un “protocole clair” dans les commissariats et gendarmeries
“Aucune victime ne doit plus repartir sans connaître ses droits et savoir où trouver du soutien”, a déclaré Marlène Schiappa lors d’un entretien accordé à La Croix, ce mardi. La secrétaire d’Etat à l’égalité entre les femmes et les hommes a ainsi défendu une proposition du groupe de travail dédié à l’accueil des femmes victimes de violences par les forces de l’ordre.
Le groupe propose en effet l’instauration d’un “protocole clair”, destiné à améliorer l’accueil des victimes en gendarmerie et en commissariat. Mais également la mise en place d’une “grille d’évaluation du danger” lorsque les forces de l’ordre interviennent à domicile ou accueillent une victime dans leurs locaux.
Schiappa a par ailleurs indiqué, au cours de la même interview, son intention de retenir la proposition de “réquisitionner les armes à feu dès la première plainte”, précisant que cette proposition doit encore “être expertisée” avec le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner. Quelques jours après l’ouverture du Grenelle, le 18 septembre, la secrétaire d’Etat soulignait déjà qu’actuellement, “même si une femme porte plainte, nous n’avons pas de protocole pour vérifier si le conjoint ou l’ex-conjoint détient une arme à feu”. Or, les armes à feu sont, selon elle, les “armes les plus utilisées pour les féminicides”.
Inscription dans la loi de toutes les formes de violence
Plusieurs groupes de travail ont souligné la nécessité de “définir les violences psychologiques et l’emprise, et [de] préciser leurs éléments constitutifs” afin qu’elles soient mieux prises en compte par le droit. Ils plaident ainsi pour l’inscription dans la loi de toutes les formes de violences : physique, psychologique mais aussi économique. Marlène Schiappa a notamment annoncé un meilleur remboursement de “la prise en charge psychologique” afin de lutter contre l’emprise psychologique.
A l’heure actuelle, seuls les violences physiques et le harcèlement moral sont répréhensibles pénalement. Harceler son conjoint ou son ex est ainsi passible de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Le groupe dédié aux violences psychologiques et l’emprise propose de faire des pressions psychologiques, qui peuvent aboutir au suicide forcé de la victime, une circonstance aggravante.
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Suspension voire suppression de l’autorité parentale des agresseurs
Dans le cas où la victime est sous ordonnance de protection et où son agresseur a donc interdiction de l’approcher, le groupe qui traite des violences intrafamiliales souhaite donner la possibilité au juge aux affaires familiales (JAF) “de se prononcer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale par le parent auteur des faits”.
Le JAF pourrait ainsi décider de suspendre l’autorité du parent agresseur voire la supprimer en cas de féminicide. En effet, le passage à l’acte intervient fréquemment lorsque les enfants passent de la garde d’un parent à l’autre. Suspendre l’autorité parentale participerait toutefois à pénaliser économiquement les victimes de violences puisqu’elle lève l’obligation pour le parent destitué de son autorité de s’acquitter d’une pension alimentaire.
Création du statut d’enfant victime
Le groupe chargé de traiter les violences intrafamiliales a demandé que soit créé, en plus du statut d’enfant témoin, celui d’enfant victime de violences. Ainsi, le parent agresseur devra répondre devant la justice des préjudices causés aux enfants, même s’ils n’ont pas été visés par les violences.
Redéfinition de l’indemnisation des victimes
Le Grenelle propose l’instauration d’une loi pour “lutter contre l’emprise économique des conjoints violents sur leurs victimes”. Pour combattre les violences économiques, le groupe suggère de s’inspirer de la procédure de réparation pour les victimes du terrorisme pour “redéfinir la procédure et les critères d’indemnisation” des femmes ayant subi des violences conjugales. Parallèlement, des mesures bancaires sont envisagées, notamment un aménagement des dettes et une avance financière d’urgence.
Marlène Schiappa a également défendu “la mise en place de congés exceptionnels” par les entreprises pour “permettre aux victimes de faire leurs démarches”.
Evolution du secret médical
Le groupe « Justice » recommande une “évolution du secret médical” afin de permettre aux soignants de signaler aux forces de l’ordre les marques de violences qu’ils ont constatées s’ils soupçonnent que la personne pourrait en être à nouveau victime.
Actuellement, dans le cas où la victime est majeure, un soignant peut apporter des faits de violence à la connaissance du procureur de la République, uniquement si la patiente a donné son accord.
Renforcement de la formation des professionnels
Le Grenelle souligne la nécessité de mieux former les professionnels susceptibles d’être en contact avec des victimes de violences conjugales. Ainsi, les effectifs de police et de gendarmerie mais aussi les professionnels de santé, les représentants syndicaux et les responsables en ressources humaines au sein des entreprises seraient concernés par des formations. Parallèlement, la mise en place d’un “brevet contre la violence” dans les écoles est envisagée.
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