L’adaptation de la saga “A la croisée des mondes” laisse éclore des pousses humanistes entre les rouages de sa machinerie bien huilée.
Dans un monde pas si différent du nôtre, la jeune et rebelle Lyra Belacqua découvre l’existence de la Poussière, une particule dotée de conscience qui attise l’appétit des autorités religieuses. Quand son meilleur ami est enlevé, elle quitte le collège d’Oxford où elle a grandi pour entreprendre un périple qui l’entraînera de Londres au Grand Nord en passant (peut-être) par des univers parallèles.
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Publiée entre 1995 et 2000, la trilogie A la croisée des mondes de Philip Pullman est classée à juste titre parmi les chefs-d’œuvre de la littérature britannique contemporaine. Librement inspirée du poème Le Paradis perdu de John Milton, elle double ses aventures extraordinaires d’une remise en question des conventions occidentales pour proposer une vision du monde profondément humaniste, anticléricale et féministe.
Potentialités à exploiter
Après l’échec de l’adaptation édulcorée réalisée par Chris Weitz en 2007, la BBC et HBO ont scellé leur coproduction sous des auspices solides en en confiant les rênes au dramaturge Jack Thorne (la pièce de théâtre, Harry Potter et l’enfant maudit) et au réalisateur Tom Hooper (Danish Girl). Le résultat de leurs efforts conjugués se révèle fidèle à l’intrigue du roman, mais souffre de rabotages sur le fond qui concernent en premier lieu la critique des dogmes et institutions religieuses.
La force et le charisme de cette petite fille rebelle, interprétée avec une conviction admirable par Dafne Keen (découverte dans Logan), nous intiment pourtant de laisser à cet univers le temps de déployer sa palette progressiste.
Dans le monde de Lyra, les coutumes des gitans sont célébrées par des enfants sédentaires ; les sorcières, considérées comme des modèles de sagesse, et chaque être humain est accompagné d’un daemon, matérialisation animale de son âme autant que compagnon d’existence. Au-delà de sa figuration ludique, c’est tout un rapport au monde qui est repensé par cette singularité : vivre avec un daemon, c’est à la fois garder un lien fondamental à la nature et troquer le “je” pour le “nous”.
En dépit de son mouvement vers le Nord et des clins d’œil insistants adressés à la série de David Benioff et D. B. Weiss, A la croisée des mondes pourrait incarner un anti-Game of Thrones si elle parvenait à déployer pleinement ses potentialités : troquer l’effondrement d’un monde sous les passions des puissants contre la construction d’une utopie collective à hauteur d’enfant.
A la croisée des mondes saison 1 sur OCS, à partir du 5 novembre
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