Super-héros quelque peu ringard de l’écurie DC Comics, Aquaman a à son tour le droit à un long métrage dédié. Loin de la noirceur et du premier degré de « Batman v Superman » ou de « Jutsice League », le film de James Wan emprunte à Marvel le ton délié et humoristique de tout un pan de sa production, mais n’échappe pas pour autant au naufrage.
Parent pauvre des super-héros DC comics, Aquaman n’a jamais eu l’envergure iconique de Superman ou de Wonderman, l’écorce tragique et l’aura ténébreuse de Batman, ou même la côte de popularité de Flash. Mais à l’heure où Marvel et son cinematic universe multi-milliardaire décline toute son écurie super-héroïque (quitte à racler les fonds de tiroir) dans des films qui règnent sans partage sur le box-office, DC a jugé bon de donner une chance à son super-héros amphibien mal-aimé. Déjà aperçu dans Batman v Superman et Justice League, l’homme-poisson a désormais le droit à son long-métrage dédié. La pêche a t-elle été bonne ?
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Why so serious ?
Pour se démarquer de son inaccessible rival, DC a longtemps misé un un ton sombre et préoccupé, loin de la signature auto-parodique et de la tambouille méta des films Marvel. Une lecture très premier degré du film de super-héros héritée des Batman de Christopher Nolan, qui avaient passé au filtre du techno-thriller, un imaginaire super-héroïque largement dilué. Le renouveau cinématographique de DC comics ordonnancé par Zack Snyder (réalisateur de Man of Steel, Batman v Superman, et une bonne moitié de Justice League) avait conservé cette teinte ténébreuse, avec ses super-héros freudiens en mal d’amour, tout en ressuscitant un panthéon super-héroïque censé tenir tête au règne hégémonique de Marvel sur le box-office.
Face à l’échec commercial de Justice League, et au tollé critique essuyé par Batman v Superman, Aquaman effectue un virage à 180°, tentant cahin-caha d’émuler le ton leste et parfois parodique des productions Marvel.
Le film s’ouvre sur la rencontre inopinée entre Atlanna, reine héritière du royaume submergé d’Atlantis (campée par Nicole Kidman) et Thomas Curry, un gardien de phare quelque peu bourru (mais au grand cœur). En cinq minutes chrono, on les voit vivre une histoire d’amour humano-amphibienne passionnée, enfanter le petit Aquaman, et couler des jours heureux sur leur phare du bout du monde. Mais des méchants Atlantes viennent capturer maman Aquaman, promise au roi d’Atlantis, privant le jeune garçon d’un amour maternel.
Steven Seagal halieutique
Des années plus tard, le jeune garçon est devenu un homme, un dur, un vrai, un (très) tatoué, qui fait régner la justice sur les mers quand il n’enquille pas des pintes dans un vieux rade de pêcheurs au côté de son paternel, qu’il aime d’un amour viril. Car cet Aquaman 2018 a tout de l’action hero des années 1980, montagne musculeuse et testosteronée qui distribue punchlines ringardes et mandales robustes ; sorte de Steven Seagal halieutique, les super-pouvoirs en plus. C’est Jason Momoa – mannequin hawaïen reconverti en acteur, rendu célèbre pour son rôle de Khal Drogo dans Game of Thrones – qui prête ses muscles, et pas grand chose d’autre, à Aquaman.
Une relecture du personnage pas dénuée d’intérêt et qui, en assumant pleinement son orientation série B, pourrait presque faire mouche. Mais lorsque le héros est rattrapé par son destin royal, et se voit confier la mission de retrouver le trident mythique du premier roi d’Atlantis afin de réunifier les royaumes atlantes et de pacifier les relations entre Océaniens et Surfaciens – vaste programme – le film peine à faire cohabiter le registre épique d’un film de fantasy et l’inclination gentiment crétine d’un action movie mou du bulbe. En résulte un gloubi-boulga informe, une confiture filmique disgracieuse, qu’un mélange des genres insoluble, et une énergie résolument nanardesque, rendraient presque attachant.
Super nanar
Réalisé par James Wan, maître de l’horreur low-budget (Saw, Insidious, Conjuring), Aquaman est un nanar fascinant qui, sans souci de cohérence esthétique, et au gré d’une direction artistique hideuse, fait péter son budget à grand coup de CGI bien baveuse. Les nombreuses scènes sous-marines, dans le royaume enfoui d’Atlantis, donnent l’impression d’une rencontre fortuite entre La petite sirène et les pires moments de la seconde trilogie Star Wars. L’occasion de voir Willem Dafoe (qui incarne le mentor d’Aquaman) chevaucher un hippocampe, des requins en armures affronter des crevettes géantes, ou une pieuvre jouer du tambour de guerre…
Action movie rigolard mixé à un simulacre de légende arthurienne subaquatique, Aquaman abandonne le sérieux papal des films DC cher à Zack Snyder, pour lui préférer le ton enlevé et parodique de tout un pan des productions Marvel, des Gardiens de la Galaxie à Thor : Ragnarok. Si l’on rigole volontiers, c’est plus souvent malgré le fillm qu’avec lui, la faute à un mélange des genres périlleux et des choix esthétiques proprement infâmes, qui font de cette nouvelle itération de l’univers étendu DC comics, un fabuleux nanar.
{"type":"Banniere-Basse"}