Disney poursuit sa politique de transposition en prises de vues réelle boostées numériquement de ses classiques de l’animation. Avec moins de grâce ici que dans « Le Livre de la jungle ».
Il y a quelques décennies, Disney devenait pour le cinéma d’animation une figure divine en parvenant, à travers le procédé de la rotoscopie (filmer, par exemple, un danseur en vue de décalquer ses déplacements sur une séquence dessinée), à prêter à ses mickeys le mouvement de corps vivants.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
https://www.youtube.com/watch?v=BsTWfcP7mjk
Aujourd’hui, les remakes live des classiques de la firme (après Le Livre de la jungle et avant Mulan, Dumbo et Aladdin dans les tuyaux) font le trajet inverse avec une prise de vues réelle qui veut à présent épouser le mouvement d’un dessin animé – un coup d’œil comparatif sur les deux versions suffit à dévoiler cette curieuse opération qui, après avoir insufflé la vie à l’inerte, travaille désormais le vivant comme du mort.
Pas étonnant donc que les seuls personnages vaguement touchants de ce conte next-gen soient non pas un prince ou une princesse, mais les objets maudits du château : pendule, chandelier, coiffeuse et clavecin, encore éveillés et volubiles, mais inquiets de voir s’approcher dangereusement l’heure de leur mutation définitive en chose.
Emma Watson a refusé “La La Land” au profit de cette fantaisie obèse
Autour d’eux ne se joue rien d’autre qu’une bête opération d’entretien du patrimoine : un reenactment du film animé qui a certes eu un peu de jugeote en castant Emma Watson pour son aura de première de la classe (“oh, des livres !”), mais s’embourbe dans un registre féerique qu’il semble incapable d’aborder sans une pointe d’ironie.
L’énergie débordante du film (les acteurs n’arrêtent pas de crier) sent moins l’enthousiasme sincère que le rire nerveux : surtout dans ses premières séquences, La Belle et la Bête est pétri d’une sorte de baroque malade et très emprunté, plus proche de la récente version de Christophe Gans que de celle, toujours inégalée, de Jean Cocteau. On apprenait cette semaine que Watson avait refusé La La Land au profit de cette fantaisie obèse. Bien vu, Emma !
La Belle et la Bête de Bill Condon (E.-U., 2017, 2 h 09)
{"type":"Banniere-Basse"}