Vous êtes allés voir Peninsula au cinéma et vous n’en avez pas eu assez ? Les zombies, vampires, meurtriers et monstres en tout genre, ça vous plaît ? Le cinéma sud-coréen en a fait sa spécialité, et pour preuve, voici de quoi ne plus dormir la nuit !
La Servante (1960) de Kim Ki-young
Parmi les films d’épouvante sud-coréens, La Servante (1960) de Kim Ki-young a valeur de film fondateur, au point que Bong Joon-ho (Parasite) n’hésite pas à le qualifier de “Citizen Kane du cinéma coréen”. Selon notre critique Jacky Goldberg, avec ce film, Kim Ki-young est devenu l’“inspirateur de toute une jeune génération de fêlés, les Bong Joon-ho, Park Chan-wook, Kim Ki-duk ou Im Sang-soo qui, en 2010, s’est carrément lancé (et perdu) dans un remake (boursouflé) du chef-d’œuvre de Kim Ki-young, The Housemaid”.
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Une famille de la classe moyenne s’enrichit suffisamment pour emménager dans une plus grande maison et engager une domestique. La servante est une jeune femme gentille, travailleuse et simple. Mais, dans sa grande naïveté, elle s’éprend d’amour pour le père de famille – un professeur de piano charmant, qui ne cesse de séduire malgré lui… Le mélodrame petit bourgeois et les tenants de cette intrigue vaudevillesque basculent alors lentement mais sûrement dans l’horreur la plus totale. La mise en scène de l’espace – un huis clos d’un noir et blanc implacable – transforme la chronique sociale en véritable film d’épouvante. Qui, de la fille aînée, la domestique, l’élève jalouse ou l’épouse docile sombrera dans la folie ? Longs cheveux noirs, œil fou, la féminité a rarement été filmée de manière si terrifiante.
Seoul Station (2016) de Yeon Sang-ho
A l’origine de Dernier train pour Busan (2016) de Yeon Sang-ho, il y a ce film d’animation sorti la même année. Seoul Station est considéré comme le préquel du fameux film de zombies : l’épidémie éclate alors qu’un père est sur le point de retrouver sa fille fugueuse, qui est exploitée sexuellement par son copain. Mais, la critique sociale sous-jacente de Seoul Station est encore plus sombre que celle du Dernier train pour Busan.
Car le premier des infectés, le zombie zéro, est un SDF. Et cette maladie si contagieuse semble bien être la pauvreté qui, des sans-abri aux classes sociales les plus précaires, s’attaque d’abord aux plus démunis. Le mal se répand et rassemble étrangement cette masse de marginaux en un déferlement de violence. Face au danger public grandissant, les forces de l’ordre n’hésitent pas à tirer sur la foule anonyme… Un film social et de zombies, d’une rare noirceur.
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The Host (2006) de Bong Joon-ho
Au contraire de Yeon Sang-ho, Bong Joon-ho cultive toujours une forme d’espoir, d’humour et de joie au cœur même de l’horreur. Avec une certaine tendresse pour ses personnages et un superbe sens du burlesque, le cinéaste oscarisé de Parasite parvient à décrire l’injustice sociale sans jamais tomber dans le misérabilisme. Souvent, les héros de ses films sont de gentils losers. Ils ne cessent de tomber sans faire exprès ou de se comporter de manière gaguesque, touchante et surprenante. Les anti-héros de Joon-ho vivent en marge de la société, au sein d’un cocon familial, à l’abri du monde. Et l’horreur, inévitablement, provient de l’extérieur.
Les personnages principaux de The Host sont les membres d’une famille modeste vivant ensemble, serrés les uns contre les autres dans un tout petit espace. L’un est sans emploi, l’autre est d’une grande immaturité et leur sœur est une championne de tir à l’arc ratée. Tous trois vivotent aux crochets de leur père et de son snack-bar au bord du fleuve. Ensemble, c’est la joie, la tendresse… Lorsqu’un monstre enlève la petite dernière de la famille, la sage et parfaite Hyun-seo, ils vont devoir se surpasser pour aller à son secours. Dans ce magnifique film de monstres, la menace est démultipliée. Derrière l’évidente monstruosité de la bête et la crainte d’une pandémie se cache sournoisement le réel danger, d’ordre politique. A se demander qui est “l’hôte” du titre du film, cet intrus détruisant tout sur son passage.
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The Strangers (2016) de Na Hong-jin
Na Hong-jin est connu pour ses thrillers aussi jouissifs que haletants (The Murderer, The Chaser). Avec The Strangers, il s’est aventuré dans les contrées du surnaturel et pas qu’un peu. Une série de meurtres inexpliqués bouleverse le quotidien d’un village reculé. Et à cela s’ajoute une étrange épidémie de fièvre… Entre film de zombies gore, chronique sociale et familiale, thriller policier et magie noire, le film oscille d’un genre à l’autre de manière toujours plus terrifiante.
Selon Serge Kaganski, alors critique aux Inrockuptibles : “On a l’impression que Na Hong-jin compile Hitchcock, Lang, Tourneur, Romero, Fulci, Miike ou, pour citer ses compatriotes, Bong Joon-ho, Kim Ki-duk et Park Chan-wook, ce qui pourrait donner le tournis. Mais le plus saisissant, c’est que ça fonctionne.” Un scénario excessif, d’inspiration baroque, pour un film d’horreur unique et terriblement efficace.
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Save The Green Planet ! (2003) de Jang Joon-hwan
Véritable petit ovni, Save The Green Planet ! est l’un de ces films cultes indescriptibles dont on se refile le secret de fan en fan. Est-ce si surprenant, finalement, que le remake de cette œuvre aussi délirante que sanguinolente soit en ce moment en préparation du côté du nouveau maître du film d’horreur, Ari Aster (Hérédité) ? Jang Joon-hwan ne s’est rien interdit en termes de mélange des genres et de folie.
Un couple est persuadé de devoir sauver la planète Terre d’une invasion d’extraterrestres. Heureusement, eux savent reconnaître les « faux » humains, les aliens qui vivent incognito parmi nous. Ils enlèvent ainsi le patron d’une entreprise de produits chimiques qu’ils torturent pour lui faire avouer sa véritable identité. Tandis que la police est à leurs trousses, la situation devient compliquée, et un danger approche…
Thirst, ceci est mon sang (2009) de Park Chan-wook
Après The Host, nous retrouvons Song Kang-ho à nouveau dans un rôle principal. Dans Thirst, ceci est mon sang, il incarne un prêtre aux tendances sacrificielles. Acceptant d’être le cobaye d’un vaccin qui pourrait vaincre une épidémie mortelle en Afrique, Sang-hyun devient un vampire. Ayant sombré du côté obscur, le prêtre s’essaye à l’amour charnel et à l’adultère… Le film de vampires de Park Chan-wook (Old Boy) est surtout prétexte à la représentation d’une passion dévorante, entremêlée de culpabilité et de revanche. L’esthétique du cinéaste, toujours aussi pop, démonstrative et excentrique, rend la violence de certaines scènes assez vaine, voire sadique.
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2 sœurs (2003) de Kim Jee-woon
Vous connaissez peut-être le remake Made in USA de ce film de Kim Jee-woon intitulé Les Intrus (2009). L’histoire est inspirée d’un conte populaire coréen dans lequel une méchante belle-mère veut se débarrasser des deux filles de son nouveau mari. 2 sœurs est un film de fantômes et de maison hantée. Mais comme tout conte qui se respecte, il s’agit en filigrane d’un drame psychologique sur le deuil, la culpabilité et les remords. De facture classique et reprenant tous les codes du film d’horreur occidental, 2 sœurs n’a pas grand-chose de spécifiquement coréen malgré son point de départ – une énième variation sur l’enfance, ses terreurs fantasmatiques, et l’horrible découverte de sa propre responsabilité. Des fantômes efficaces, mais manquant un peu d’originalité.
The Mimic (2017) de Jung Huh
Ces dernières années, l’industrie du film horrifique exploite à fond la thématique des cinq sens : une écrivaine sourde et muette confrontée à un tueur sadique (Pas un bruit), une famille contrainte de ne pas faire un bruit au risque de se faire repérer par un monstre (Sans un bruit), une femme et ses enfants contraints de fuir les yeux bandés (Bird Box)… Jung Huh joue avec cette terreur universelle qui est de ne pas pouvoir se fier à ses propres sens. Et à cela il ajoute une figure typique des films d’horreur, celle de l’enfant diabolique. Le mélange donne The Mimic, une créature capable d’imiter n’importe quelle voix humaine.
Le monstre a donc figure d’ange, c’est une petite fille adorable qui – c’est étrange – possède exactement la même voix que l’enfant de l’héroïne. La métaphore psychologique est encore une fois d’un classicisme paresseux, une histoire de deuil impossible, de culpabilité, etc. Mais l’ambiance est suffisamment mélancolique pour laisser monter l’angoisse à pas lents et jouissifs, jusqu’à la déflagration finale. Pour les abonnés, The Mimic est disponible sur Netflix.
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