Cette enième adaptation du roman de H.G. Wells gagne le pari de son parti pris anti-spectaculaire en laissant les aliens hors champ et en suivant le destin de quelques humains survivants.
L’anecdote (qui tient en réalité plus de la légende) est fameuse : le 30 octobre 1938, une adaptation radio de La Guerre des mondes narrée par Orson Welles aurait causé un vent de panique à travers les Etats-Unis, les auditeurs croyant qu’il s’agissait d’un bulletin d’informations, et qu’une attaque extraterrestre était réellement en cours.
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Récit d’invasion séminal, le roman de H.G. Wells, publié en 1898, imagine depuis cent vingt ans notre extinction à travers ses nombreuses adaptations audiovisuelles. A l’heure de la crise climatique et des théories de l’effondrement, le spectateur n’est plus dupe : une attaque d’aliens serait plus qu’improbable, mais la fin du monde parfaitement plausible.
Une apocalypse ouatée
C’est ce terrain “collapsologique” qu’investit la dernière adaptation du roman en date, une mini-série franco-anglaise produite par Canal + et pilotée par le Britannique Howard Overman (créateur de Misfits). L’attaque éclair d’une civilisation extraterrestre inconnue, qui décime l’humanité en quelques secondes, y fait figure de prétexte, permettant d’envisager la fin du monde, autrement plus palpable, que notre époque catastrophiste ne cesse de prédire.
A l’inverse de l’adaptation (sublime) qu’en tirait Spielberg en 2005, et sur laquelle planait le fantôme du 11-Septembre, l’invasion ne se fait pas ici dans un déluge de flammes. C’est d’abord un signal, venu d’une galaxie lointaine, que capte Catherine Durand (Léa Drucker), une scientifique française travaillant dans un observatoire des Alpes.
https://www.youtube.com/watch?v=Wq3j1Pmi6BU
C’est ensuite une pluie d’objets non-identifiés qui percutent les grandes zones urbaines de notre planète, sans toutefois causer de dégâts majeurs. C’est enfin une arme redoutable, et invisible, qui décime la quasi-totalité de la population mondiale en un instant. La fin du monde est survenue sans qu’aucune explosion ne retentisse, ni qu’aucun alien ne se manifeste. « C’est ainsi que finit le monde, pas sur un boum, mais dans un murmure », écrivait T.S. Eliot dans son poème épique Les Hommes creux.
Un monde post-apocalyptique presque inchangé
Restent quelques survivants ayant réussi à s’abriter au moment de cette apocalypse ouatée : Catherine donc, retranchée dans son observatoire avec une poignée de militaires, mais aussi Bill Ward (Gabriel Byrne), neuroscientifique londonien qui parvient à sauver son ex-femme (Elizabeth McGovern) au moment de l’attaque.
Nous suivrons leur trajectoire, ainsi que celle d’une poignée d’autres survivants, des deux côtés de la Manche, dans un monde post-apocalyptique presque inchangé, mais qui a soudainement cessé de tourner.
Maligne dans son dispositif (des aliens invisibles, une fin du monde cotonneuse) et sa déclinaison naturaliste de l’apocalypse selon H.G. Wells, cette Guerre des mondes 2019 (dont nous avons vu deux épisodes sur les huit prévus) parvient à imposer sa vision, profondément dépressive et résolument anti-spectaculaire, du roman original. Reste à voir si ses défauts rapidement identifiés (quelques dialogues indigents et un jeu d’acteur parfois consternant, notamment dans les séquences françaises) ne ternissent pas ses qualités.
La Guerre des mondes sur Canal + à partir du 28 octobre
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