Le groupe américain publie un nouvel album dévoilé par surprise en digital. Un magnifique cadeau pour le changement de saison.
Les vagues de l’équinoxe sont connues pour être les plus belles. C’est sur le rivage que l’on retrouve Fleet Foxes avec Shore, un quatrième album en forme de surprise – secret protégé puis dévoilé une poignée de jours avant sa sortie. Ce n’est pas la première virée contemplative face aux flots avec le groupe de Seattle. Sur Drops in the River, titre issu de leur premier lp de 2008, on entendait déjà : “On the shore, speak to the ocean and receive silence.” Lieu de naissances et de renaissances, tout sort de l’océan et tout y retourne.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Cycliques comme le rythme des marées, les crises existentielles de Robin Pecknold donnent le ton des productions de Fleet Foxes. Helplessness Blues (2011) et la tournée qui avait suivi sa sortie avaient laissé le songwriter en pleine tourmente : angoisse liée à sa relation au succès, tensions avec les autres membres, crise de couple…
Fleet Foxes retrouve la lumière
Robin s’accroche alors à l’anonymat comme à une bouée de sauvetage et s’en va rejoindre discrètement les bancs de l’université de Columbia (New York) parmi les étudiants en littérature anglaise. Il reviendra à la musique six ans plus tard avec Crack-Up, album personnel et cathartique, dont le titre est une référence directe à une nouvelle de Francis Scott Fitzgerald.
A Crack-Up – sombre, dense et exigeant – s’oppose Shore, qui se tourne vers la lumière, la légèreté et l’apparente simplicité d’une cascade frémissante de cordes et de voix aériennes. Le renardeau a lâché la meute pour un temps. Robin a non seulement géré l’écriture, mais aussi la production et les arrangements.
Composant en pleine quarantaine, il a cependant trouvé les moyens de s’entourer de Christopher Bear (Grizzly Bear), Kevin Morby, Hamilton Leithauser (The Walkmen)… Figure tutélaire et influence sans équivalent pour Robin Pecknold, Brian Wilson fait même une apparition sur Cradling Mother, Cradling Woman via un extrait vocal tiré d’une version a cappella de Don’t Talk (The Pet Sounds Sessions).
Un baume pour le cœur, une réponse délicate au chaos ambiant
En quête d’une musique “à la fois complexe et élémentaire, sophistiquée et humaine”, Robin cite Arthur Russell, Michael Nau, Van Morrison, Nina Simone, Sam Cooke et João Gilberto en exemples. Et cela s’entend : Shore est l’album le plus chaleureux de Fleet Foxes à ce jour. Nombre de titres ont cette capacité à se transformer en classiques instantanés dès la première écoute.
La force émotionnelle du morceau d’ouverture Wading in Waist-High Water, les envolées de pop baroque sur Going-to-the-Sun Road portées par la voix profonde du compositeur portugais Tim Bernardes, la fraîcheur et la sincérité de Young Man’s Game, l’émouvante prière amoureuse de Can I Believe You nous rappellent les grands moments de bravoure de la formation à ses débuts.
Ce quatrième chapitre discographique est un baume pour le cœur, une réponse délicate au chaos ambiant de cette annus horribilis qui n’en finit plus. Poussé vers de nouveaux rivages plus lumineux, Robin Pecknold a su jeter l’ancre au bon endroit.
Shore (Anti-/PIAS)
{"type":"Banniere-Basse"}