La journaliste marocaine, Hajar Raissouni, a finalement obtenu une grâce royale, mercredi 16 octobre, trois semaines après avoir été condamnée au Maroc, par le tribunal de Rabat, à un an de prison ferme pour “avortement illégal” et “débauche et relations sexuelles hors mariage.”
Mise à jour du 17 octobre 2019 : Trois semaines après avoir été condamnés pour « avortement illégal » et « débauche et relations sexuelles hors mariage », la journaliste du quotidien arabophone Akhbar Al-Yaoum, Hajar Raissouni, son fiancé et son gynécologue, ont finalement été graciés par le roi Mohamed VI, comme l’a annoncé le Ministère de la Justice dans un communiqué.
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C’est un grand sourire affiché devant les caméras et les doigts en V, que la journaliste marocaine a déclaré à l’AFP que “la grâce royale a corrigé un procès injuste”. Le roi aurait en effet accordé cette grâce par “compassion” et “souci de préserver l’avenir des deux fiancés qui comptaient fonder une famille conformément aux préceptes religieux et à la loi, malgré l’erreur qu’ils auraient commise”, rapporte l’Agence France Presse.
Just verified the information. King of Morocco pardoned Hajar her fiancé and the doctor. #freehajar
— Aida Alami (@AidaAlami) October 16, 2019
« Je suis triste. J’ai l’impression de quitter un enterrement. Le moindre espoir de changement au Maroc anéanti en un verdict. » Voilà ce que tweetait la journaliste marocaine Aida Alami, lundi 30 septembre, dans la foulée de la condamnation à un de prison ferme de sa consœur Hajar Raissouni pour « avortement illégal » et « débauche et relations sexuelles hors mariage ». Cette correspondante du New York Times au Maroc, jointe par les Inrocks, dresse un constat sans appel de la décision du tribunal de Rabat : « L’arbitraire reste le projet politique du pays. » Pour rappel, l’IVG y est interdite, sauf dans le cas où la vie de la femme enceinte est en danger.
J’ai l’impression de quitter un enterrement. Le moindre espoir de changement au Maroc anéanti en un verdict.
— Aida Alami (@AidaAlami) September 30, 2019
En août dernier, Hajar Raissouni, journaliste pour le quotidien indépendant Akhbar Al Yaoum, était arrêtée à l’entrée d’un cabinet médical de Rabat, pour « flagrant délit d’avortement illégal ». Elle avait alors été placée en détention provisoire, jusqu’au moment du procès, lundi 30 septembre. Interpellés en même temps qu’elle, son fiancé et son gynécologue ont respectivement écopé d’un et deux ans d’emprisonnement. Par ailleurs, l’anesthésiste a été condamné à un an avec sursis, la secrétaire à huit mois avec sursis.
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“Hajar a été victime d’une justice qui n’est pas indépendante”
« Il semblerait que beaucoup de gens soient très en colère pour des raisons variées. C’est une affaire à facettes multiples”, confie aux Inrocks Aida Alami. En effet, d’après elle, l’affaire ouvre plusieurs pistes de réflexion. « Hajar a été victime d’une justice qui n’est pas indépendante« , analyse-t-elle, faisant un lien entre sa condamnation et l’engagement de la jeune femme en faveur des droits de l’homme, sans compter sa couverture du mouvement social du Hirak, dans le Rif marocain.
La principale intéressée a d’ailleurs elle-même affirmé être victime d’un procès « politique ». Hajar Raissouni avait démenti tout avortement lors d’une précédente audience : c’est selon elle pour une hémorragie interne qu’elle s’était rendue chez le médecin, information confirmée par son gynécologue au tribunal. En outre, la journaliste a affirmé avoir été « contrainte à un examen médical, sans son accord », après son interpellation, comme le rapporte l’AFP. Son avocat a annoncé à l’agence qu’il allait faire appel, tout comme le conseil du gynécologue.
Sur Twitter, de nombreux internautes n’ont pas manqué de vivement réagir à la décision rendue. »C’est parce que c’est une journaliste qui écrit pour Akhbar Al Yaoum, un des seuls médias qui a survécu au Maroc a vingt ans de répression de la presse”, nous assure Aida Alami, qui a annoncé sur son compte Twitter la tenue d’un sit-in de soutien devant le parlement marocain, mercredi 2 octobre.
Sit-In demain devant le parlement à 17:30 en soutien à #freehajar. Est ce que les médecins se mobilisent pour docteur Belkeziz?
— Aida Alami (@AidaAlami) October 1, 2019
A 13h au Tribunal de Rabat, ce n'est pas que le sort de #hajarraissouni qui sera scellée. Ce sont le peu de journalistes indépendants dans ce pays qui seront aussi jugés. Le pouvoir nous adressera un message. Je crains fortement qu'il soit liberticide. J'espère me tromper.
— Salaheddine Lemaizi (@LemaizO) September 30, 2019
#HajarRaissouni écope d’un an de prison ferme, ainsi que son fiancé. Le médecin, accusé d'avoir pratiqué l'avortement, est quant à lui condamné à deux ans de prison ferme.
Voici le prix de l'engagement politique au Maroc. Quelle horreur. https://t.co/hwkalopJWW
— Rachid l'instit (@rachidowsky13) September 30, 2019
Une pensée triste à Hajar Raissouni, dont la vie a été brisée aujourd’hui. Triste journée également pour l’état des droits et des libertés au maroc!
— Abdellah Tourabi (@Atourabi) September 30, 2019
Une tribune de soutien
Sur le plan des libertés individuelles, plusieurs personnes ont manifesté leur mécontentement depuis l’arrestation d’Hajar Raissouni sous le hashtag #HorsLaloi, dans la foulée d’une tribune publiée par le Monde et le Parisien. Co-écrite par l’écrivaine franco-marocaine Leïla Slimani et la réalisatrice Sonia Terrab, celle-ci dénonce « les lois liberticides » du Code pénal marocain et demande d’« engager un débat national sur les libertés individuelles » dans le pays. Selon l’AFP, entre 600 et 800 avortements clandestins sont pratiqués tous les jours au Maroc, tandis que 73 personnes ont été poursuivies pour des IVG, en 2018.
https://twitter.com/LaimeurSoukaina/status/1176062267194007552
Envoyez « Je signe » à texte490@gmail.com #texte490 #horslaloi #freehajar @SoniaTerrab https://t.co/I4yFfoLSug
— Zineb (@zinebparis) September 23, 2019
Leïla Slimani, affirme d’ailleurs, dans une interview accordée à Brut, que l’objectif est « qu’un débat ait lieu sur les libertés individuelles et la dépénalisation de la sexualité de manière générale, et pour la légalisation de l’avortement”.
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