Mêlant images d’archives et images tournées par l’auteur-compositeur-interprète lui-même, ce documentaire de Marc Di Domenico révèle le regard généreux du chanteur-filmeur.
On savait déjà qu’Edith Piaf avait offert à Charles Aznavour une chose importante : sa rhinoplastie. On ne savait pas qu’elle lui avait fait un autre beau cadeau, tout aussi phallique au demeurant : une caméra 16 mm de la marque Paillard (sic). Et qu’il a ensuite beaucoup filmé, de 1948 à 1982, passant du 16 mm au Super 8, du muet au parlant, partout où le menaient son métier de chanteur et ses vacances de mari et de père.
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Des images intimes bouleversantes
Le documentaire de Marc Di Domenico est un mélange très impur : le montage réunit images d’archives (cinématographiques et télévisuelles) et images tournées par Aznavour, que ce dernier lui avait confiées quelques mois avant sa mort, confessant qu’il ne les avait jamais beaucoup regardées. Une voix off, montage d’écrits et d’interviews du chanteur lu par Romain Duris, éclaire ce que les images ne disent pas, méditations parfois très inspirées sur le cinéma et la représentation.
Aznavour s’intéressait aux gens, aux anonymes plus qu’aux décors ou aux monuments
Ses chansons défilent aussi, enrichissant le portrait d’un homme somme toute assez mystérieux, au-delà de l’artiste. Ce qu’on peut dire avec certitude du filmeur Aznavour, si l’on s’en tient aux images sélectionnées, c’est qu’il s’intéressait aux gens, aux anonymes plus qu’aux décors ou aux monuments, ce qui n’est pas toujours le cas des cinéastes amateurs, et qu’il faisait souvent plusieurs prises, mettant en scène ses proches, comme si au fond un vrai cinéaste dormait en lui.
L’un des plus beaux moments du film est celui où, pour la première fois de sa vie – il a alors 40 ans – il se rend en Arménie, la terre de ses ancêtres, et qu’on l’y voit, dans un énorme sourire et moult baisers, faire la connaissance de sa grand-mère paternelle. Est-il besoin de préciser que ce passage est déchirant ? Comme celui où Aznavour dit tous les liens qui relient les peuples juif et arménien.
Le Regard de Charles de Marc Di Domenico et Charles Aznavour (Fr., 2019, 1 h 23)
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