Le portrait finement tracé d’un rugbyman polynésien exilé dans l’ovalie française.
Le rugby n’a jamais eu les faveurs du film de sport, à quelques exceptions près, comme Invictus de Clint Eastwood. Dans Mercenaire, il est à nouveau la toile de fond d’un récit national contrarié, empreint d’inégalités et de lutte raciale : celui de la place des Océaniens dans le peuple français. Dans ce premier film de Sacha Wolff, on suit l’histoire de Soane, Wallisien bien bâti, envoyé via de crapuleux réseaux de recrutement grossir les rangs des championnats de la métropole : pas les ors du Top 14, mais les premières lignes des clubs de seconde zone. On découvre un sulfureux climat de traite des êtres humains qui n’a rien à envier au système des rabatteurs de footballeurs africains.
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Wolff fait bon usage de ces carrures surhumaines en évitant justement de trop magnifier leur image de puissance et s’applique en contrecoup à les dégrader moralement, à les mettre en position de faiblesse, là où leurs pectoraux ne sont d’aucun usage. Ainsi, Mercenaire se fait, dès l’arrivée de Soane en métropole, le récit d’un chemin de croix dans la jungle de l’emploi et les affres de la subsistance.
Un peu scolaire dans son scénario, dont la mécanique et les lignes de force apparaissent de façon trop visible (dilemmes un peu téléphonés, antagonistes dessinés à gros traits), le film parvient néanmoins à convaincre. Quand il se penche sur les origines îliennes du personnage, où le récit nous ramène à quelques reprises, Wolff tient un sujet assez rare et évite l’exotisme au profit d’un traitement aux accents documentaires. Un journaliste amateur de jeux de mots clôturerait sûrement en disant que l’essai est transformé.
Mercenaire de Sacha Wolff (Fr., 2016, 1 h44)
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