Détaché de toute contrainte, Temples savoure sa liberté sur un troisième album massif, au risque de s’y perdre.
Le revival psychédélique des années 2010 n’aura épargné personne. Pas même ses fers de lance. Afin de s’assurer une certaine longévité, les formations du genre ont dû faire face à l’éternel dilemme : conserver le classicisme qui leur avait ouvert les portes du succès ou tenter de se réinventer. Temples, propulsé comme la coqueluche néopsyché britannique à la sortie de son premier disque Sun Structures (2014), ne cesse de suivre cette dernière option, refusant à tout prix la redite.
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Des morceaux séduisants et une production grandiloquente
En 2017, les Anglais surmontaient l’écueil du deuxième album avec Volcano et ses pop-songs dopées aux effets synthétiques. Deux ans plus tard, ils poursuivent leurs intentions sur Hot Motion, loin de se soucier d’une quelconque exigence formelle. “C’était impensable de sortir des suites identiques à notre premier disque, on se serait fait crucifier. Mais d’un autre côté, on risquait la même sentence en proposant quelque chose de différent, relativise le bassiste Thomas Warmsley. Finalement, c’est excitant d’essayer de changer l’idée que le public se fait de notre musique.”
Après le départ du batteur Sam Toms sans plus d’explications – ce dernier a rejoint les barjots de Fat White Family en 2018 –, le groupe devenu trio s’est naturellement replié dans le home-studio du chanteur-guitariste James Bagshaw, situé dans son Northamptonshire natal, pour s’atteler à la confection d’un troisième lp. Sans pour autant chambouler le processus d’écriture et l’approche DIY de l’enregistrement qu’ils entretiennent depuis le premier jour, les trois dandys restants progressent à l’instinct. “On ne voulait pas être aussi méticuleux qu’avant, précise James. On a préféré écouter notre cœur plutôt que notre tête. Il fallait suivre notre intuition et non pas essayer d’avoir quelque chose de parfait. Si ça sonnait bien, on passait à autre chose.” Thomas précise : “On s’est simplement fait plaisir en s’amusant avec nos guitares.”
Six cordes rutilantes, basses lourdes, batteries martiales… Hot Motion se démarque de ses prédécesseurs par une puissance décuplée. Ici, les synthés ont cédé leur place au profit d’un arsenal de riffs heavy que le triumvirat se fait une joie d’aligner au fil des morceaux (Holy Horses, The Howl, Atomise). Si les influences sixties de Syd Barrett, Marc Bolan ou des frères Davies sont toujours palpables, Temples s’échappe une fois de plus des carcans psychédéliques en piochant aussi bien dans la pop synthétique des années 1980 que dans le hip-hop old school (Context et sa rythmique à la Grandmaster Flash).
“Certains rappeurs comme Nas avec Illmatic sont de grandes influences pour nous. Les beats de hip-hop m’ont toujours fasciné, alors ils finissent par s’immiscer dans nos chansons”, observe James. De cette liberté créatrice,Temples parvient à élaborer des morceaux séduisants mais semble obnubilé par une recherche de l’intensité. Pour rendre compte de l’énergie déployée, les Anglais se parent d’une production grandiloquente, qui finit par asphyxier les mélodies, souvent noyées dans un océan de reverb. A tort, quand on connaît le talent d’écriture de leurs auteurs.
Album Hot Motion (ATO Records/PIAS)
Concert Le 20 novembre, Paris (Le Trabendo)
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