Un film inachevé d’Orson Welles, le retour de « Narcos », le nouveau western farcesque des frères Coen, l’intégral « Harry Potter » et le final de « House of Cards », le géant du streaming a encore de quoi vous tenir devant votre petit écran ce mois-ci.
Les séries
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House of Cards – Saison 6 (le 2 novembre)
Pour ceux qui l’ont vu, le dernier épisode de la saison 5 de House of Cards a pris des allures de prophétie. Frank Underwood y démissionne de ses fonctions de Président dans l’optique de placer sa femme à la tête de l’Etat pour mieux contrôler le pays en agissant en dehors de la sphère politique. Mais alors que Frank s’est livré à une nouvelle manipulation frauduleuse, Claire se désolidarise de lui et assène un désormais culte « My turn! » en direction du spectateur. C’est le dernier plan de la saison, nous sommes le 30 mai 2017. Cinq mois jour pour jour après cette annonce, Kevin Spacey est accusé de harcèlements sexuels. Netflix décide de se séparer de l’acteur et suspend la série pour une durée indéterminée. Mais sous l’impulsion de Robin Wright – impliquée dans la série au point d’en être devenue l’une des productrice et réalisatrice (une dizaine d’épisodes, dont le fameux dernier épisode de la saison 5 ) –, la production est relancée début 2018. Le scénario est modifié pour faire croire à la mort de Frank et le nombre d’épisodes prévus passe de 13 à 8. Si dans les faits il est bon de rappeler que Kevin Spacey n’a toujours pas été jugé coupable pour ces accusations (la première est prescrite et les autres sont en cours de jugement), on se réjouit de découvrir la sixième et dernière saison d’une série politique qui aura intensément dialogué avec son époque.
Narcos : Mexico – Saison 1 (16 novembre)
Cette nouvelle saison ne s’inscrit pas dans la continuité narrative de la troisième saison de Narcos mais marque son redéploiement à un autre endroit de la chaine de production de cocaïne. Exit donc la Colombie et Pablo Escobar, bonjour le Mexique et Félix Gallardo, parrain de la drogue et chef du cartel de Guadalajara des années 70 à la fin des années 80 (il est arrêté et condamné à 40 ans de prison, peine qu’il purge toujours dans une prison de haute sécurité mexicaine). Il sera incarné par Diego Luna, acteur notamment connu pour son personnage de Cassian Andor dans Rogue One de Gareth Edwards (2016) et pour son rôle dans le biopic Harvey Milk de Gus Van Sant (2008). Le camp des forces de l’ordre sera lui représenté par Michael Pena qui a jusque-la endossé des seconds rôles dans Fury (2014), Ant-Man (2015) ou Seul sur Mars (2015). On se souviendra enfin que lors de la production de la série, la fiction a tragiquement rencontré la réalité. Carlos Munoz Portal, membre de l’équipe de repérage de Narcos : Mexico, a été retrouvé le corps criblé de balles en septembre 2017. Si ce meurtre demeure irrésolu, l’implication d’un cartel est la piste privilégiée par les autorités.
https://www.youtube.com/watch?v=VBLcYJ7C4F0&frags=pl%2Cwn
1983 – Saison 1 (30 novembre)
Avec cette série, Netflix poursuit sa vaste stratégie de développement national en Pologne. 1983 se déroule dans une version alternative de la Pologne de 2003. Dans cette dystopique, les conséquences d’un attentat datant de 1983 entraine l’irrésolution de la Guerre Froide. Si le rideau de fer tient toujours, le pays qui en détient le clé est désormais une Pologne au régime policier tout puissant. Réalisée par un quatuor des réalisatrices polonaises (dont Agnieszka Smoczyńska, réalisatrice de The Lure en 2015), 1983 s’annonce comme un série d’espionnage à l’imagerie léchée.
Les films de fiction
La Balade de Buster Scruggs des frères Coen (le 16 novembre)
Avec ce film des frères Coen, Netflix tient sans-doute sa meilleure production maison à ce jour. Anthologie composée de six récits paraboliques, La Balade de Buster Scruggs s’attaque à la démythification de la conquête de l’Ouest. Mais cette critique farcesque, ce grand détournement d’une Amérique cupide, cruelle, ironique, absurde, bête et mortifère est d’une jubilation et d’une poésie folles. Jamais leur cinéma n’avait atteint un tel niveau d’abstraction lyrique. Au casting, on retrouve une vieille connaissance (Tim Blake Nelson, qui jouait déjà dans O’Brother en 2000) et de nouvelles têtes (James Franco, Liam Neeson, Tom Waits, Brendan Gleeson).
Outlaw King : Le Roi hors-la-loi de David Mackenzie (le 9 novembre)
Vous aviez aimé Braveheart de et avec Mel Gibson (1995) ? Alors vous aimerez sans-doute Le Roi hors-la-loi. Réalisé par David MacKenzie – récemment auteur de Comancheria (2016) –, ce film historique redonne vie à Robert de Brus, qui sera cette fois-ci incarné par la star de Star Trek, Chris Pine. Au programme, un impressionnant plan-séquence inaugural de près de dix minutes, de la violence, de gros moyens et une vision qui laisse la place aux contradictions entre aspirations à la liberté et le prix humain qu’elle réclame.
Les huit films de la sage Harry Potter (le 1er novembre)
Avis aux nostalgiques ! Alors que le second opus des Animaux fantastiques sort la semaine prochaine et devrait nous en apprendre plus sur le passé de Dumbledore, Netflix a acquis les droits de la saga Harry Potter. Sorties de 2001 à 2011, ces huit adaptations des romans de J.K. Rowling représentaient un bon investissement puisque qu’elles ont rapporté en tout 7,7 milliards de dollars pour un budget cumulé de 1,2 millards. Pourtant, au petit jeu du classement au box-office, la franchise Rowling (qui comporte donc les huit Harry Potter et le premier Animaux Fantastiques) a été dépassée en début d’année par Star Wars et occupe actuellement la troisième marche du podium des franchises les plus rentables de l’histoire, loin derrière les Marvel, tout puissant avec leur 13 milliards de recettes. Mais ce duel entre sabre laser et baguette magique devrait à nouveau tourner à l’avantage des sorciers puisque l’exploitation des films sur Netflix et surtout la sortie d’un nouveau film risquent fort de les faire repasser devant.
Public Ennemies de Michael Mann (le 9 novembre)
Pourquoi voir ou revoir Public Ennemies (2009) ? Tout d’abord parce qu’il s’agit de la dernière fois où Johnny Depp a été un grand acteur. Car depuis, il ne semble plus savoir jouer autre chose que des personnages d’extravagants maniérés à la limite de la folie, comme si Jack Sparrow avait refusé de lui rendre son corps à la fin du tournage du quatrième opus de Pirate de Caraïbes (2011). Ensuite pour la puissance visuelle unique de Michael Mann, cet artisan du numérique, qui utilise ici la dureté de l’image pour rendre compte d’un monde (les années 30) où le capitalisme tord le cou aux derniers romantiques anar.
Captives d’Atom Egoyan (le 8 novembre)
Thriller claustrophobe, Captives (2014) raconte la séquestration d’une jeune fille et l’enquête de ses parents pour la retrouver alors que les années passent. Si le titre est au pluriel, c’est que le désir de rétention du film ne cesse de déborder de la seule figure de sa prisonnière pour s’étendre à sa famille, captive d’un deuil impossible et d’un espoir usé à la corde, et au film lui-même, enfermé dans une sophistication clinique aussi sévère que fascinante.
De l’autre coté du vent d’Orson Welles (le 2 novembre)
Film inachevé d’Orson Welles, De l’autre coté du vent connait aujourd’hui une forme définitive conduite sous la houlette du monteur de Démineur et portée par Peter Bogdanovich, acteur principal du film aux côtés de John Houston. Le réalisateur du Faucon Maltais y incarne un vieux réalisateur faisant son come-back dans le gratin d’Hollywood lors d’une grande soirée organisée en son honneur, soirée durant lequel il trouvera la mort. Dans son arc narratif, il est intéressant de noter à quel point De l’autre côté du vent ressemble au tout premier film d’Orson Welles, Citizen Kane. Même mort du personnage principal comme (dé)verrouillage du récit qui s’organise dès lors en flashbacks éclairant sa mort sous différentes lumières. Le petit garçon de Citizen Kane est mort dans l’évocation d’un jouet d’enfant perdu. Le vieil homme de son dernier film (sorte de compression césarienne d’Hemingway, Huston, Ford et Welles lui-même) expire lui d’une autre perte, celle du film qu’il ne pourra jamais faire, celle de visions artistiques trop fulgurantes pour que le réel en accouche. Il en résulte un film-monstre qui se répand en hallucinations psychédéliques, se consume dans une tressaillante modernité et se venge du réel en ne s’offrant pas à lui, aujourd’hui aussi bien qu’il y a 40 ans. L’inachèvement De l’autre côté du vent est plus que jamais son essence.
Le documentaire
Ils m’aimeront quand je serai mort de Morgan Neville (le 2 novembre)
En complément à De l’autre coté du vent, il est indispensable de voir le documentaire que Morgan Neville a réalisé sur les quinze dernières années du réalisateur et son dernier projet. Son titre est une citation d’Orson Welles lui-même, témoignage de l’étendue de son cynisme désabusé. A travers des rushs du film inachevé, des images de making-of, des archives des rares apparitions de Welles et des témoignages se dresse le portrait kaléidoscopique d’un ogre insatiable, d’un enfant colérique et d’un démiurge auto-destructeur.
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