Un beau documentaire sur le quotidien de quelques lycéens, entre tourments personnels et solidarité collective.
Plus de vingt-cinq ans après avoir sondé la cruauté des cours de recré en filmant les enfants d’une classe de maternelle dans Récréations, Claire Simon retourne sur les bancs de l’école et livre avec Premières solitudes à la fois une sorte de suite et un passionnant miroir inversé de ce “premier” film (d’ailleurs également en salle, en version restaurée). Construit autour de longs et attentifs dialogues entre dix élèves de première d’un lycée d’Ivry, Premières solitudes donne le temps à ces jeunes de révéler un à un les rêves, les doutes et les souffrances qui les animent.
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Les coups de pied et les lynchages des corps pas encore socialisés de Récréations ne sont plus là, et pourtant la violence pointe le bout de son nez. Invisible à l’écran cette fois, mais plus douloureuse, elle transparaît avec la parole : un chagrin d’amour, un père coincé dans le silence, un autre à qui on interdit de voir son fils, une mère qui regarde une série sur son iPad pendant que sa fille est devant la télé. Au-delà de ces aveux souvent déchirants, ce qui étonne et émeut dans ces dialogues, c’est la capacité de ces jeunes à écouter, à se taire et, par un regard, à pouvoir panser la blessure de l’autre.
Alors que Récréations était un film sur l’absence cruelle d’empathie, Premières solitudes en révèle sa merveilleuse naissance. Comment, face à celui qui se tient devant nous, on peut, non pas souffrir comme lui, mais essayer de souffrir avec lui. Le regard de l’autre posé sur soi, ces premières solitudes sont alors, peut-être, plus supportables.
Premières solitudes de Claire Simon (Fr., 2018, 1 h 40)
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