Avec « Simulation Theory », leur huitième opus, Muse s’enfonce dans le délire conspirationniste en y ajoutant des teintures pop et rétros. A éviter de toute urgence.
A chaque nouveau disque, Muse nous complique la tâche. On a du mal à comprendre ce qui se passe, on se pose des questions. Est-ce que Muse se dévorent eux-mêmes dans leur délire pop-électro conspirationniste issu de la mégalomanie irrattrapable et un peu dépassée du leader Matthew Bellamy ? Ou est-ce que le groupe britannique, dans une pente descendante depuis The Resistance (2010), a décidé de produire davantage de musique simulée, entre instruments gadgétisés et expérimentation lourdingues ?
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Le nouvel opus symboliquement intitulé Simulation Theory sorti ce vendredi est donc une nouvelle raison de s’interroger (et de déprimer) sur les réelles motivations du groupe. L’heure du « c’était mieux avant » n’étant plus forcément d’actualité – car on pense très franchement que Muse se force à jouer sur scène de vieux morceaux pour combler les fans –, il est maintenant temps d’essayer de comprendre ce qui forge désormais la « Muse touch », si elle existe vraiment.
Épuisement puissance 1000
On y distingue une fascination malheureuse pour la science-fiction, une ambiance rétro un peu futile… Bref, trop et rien ; trop de choses insupportables et inaudibles : un RnB futuriste passif-agressif (Propaganda), une introduction sans inspiration d’un jeu vidéo arcade (Algorithm), un faux gospel à la Queen (Dig Down), une balade boursouflée par ordinateur (Something Human)…
Matthew Bellamy, tête (un peu trop) pensante du groupe, avait déclaré avant la sortie de l’album qu’il avait composé les chansons une par une, sans qu’elles aient un véritable lien entre elles. Tentative désespérée de faire oublier encore plus l’album-concept Drones (2015) qui se basait sur une seule histoire post-apocalyptique, ou compromis à l’expérimentation ? Probablement ni l’un ni l’autre. Simulation Theory, dans sa globalité, est un jukebox délirant et informe dans la lignée de ce que propose le groupe depuis, au moins, The 2nd Law (2013) dans lequel on retrouvait de la dubstep, du rock symphonique et de l’électro épuisant. Enfin Simulation Theory, morceau après morceau, nous rappelle la tendance de Muse à balancer des sonorités sans qu’elles trouvent une véritable place dans cet objet, si évocateur soit-il, de l’album.
Fin du game
En règle général, le trio britannique, anciennement réputé pour son énergie sur scène, attend les concerts pour se rattraper et faire en sorte de personnaliser leurs albums, avec une mise en scène gigantesques, des stroboscopes, lasers, spectacles en direct et boules de feu. Si tous ces aspects nous évoquent également la perdition de Muse à fabriquer des spectacles cohérents, il nous est très difficile d’imaginer comment des morceaux comme Get Up and Fight (l’ineptie, la clownerie de ce nouvel album), The Dark Side ou Pressure, deux morceaux typiquement formatés en studio et inadaptés au live, sauront donner du relief à des concerts. Alors oui, on imagine des chorégraphies pop pour Thought Contagion, des spots lumineux et des jets de guitares sur le heavy Blockades… Mais ces morceaux ne trouveront pas autant de places sur les setlists, déjà bien déprimantes des dernières tournées.
Muse n’avait pas vraiment besoin de ce nouvel opus pour montrer sa décrue infinie en studio et, probablement, en show, mais en même temps Simulation Theory est difficile à ignorer puisqu’il en est le parfait représentant. Après une campagne de clips criante de médiocrité et oubliée aussi vite que le rythme des publications (trois clips le même jour pour la sortie de l’album !), cette pochette album typée « affiche de film » (le groupe a débauché l’artiste derrière celle de Stranger Things) à épingler au panthéon des pochettes les plus surfaites puis la publication avancée de la moitié de l’album, tout présageait un tel marasme. Déprime explicable également par un Matthew Bellamy en mode pilote automatique, sans aucun recul sur ce qu’il compose (le numérique nous domine, la propagande ça tue, la guerre c’est mal, la révolution c’est bien). Gêne symbolisée par un dernier morceau au titre assez évocateur : The Void, le vide.
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