Reprise d’un sommet de la comédie musicale hollywoodienne, où Hawks filme génialement “l’irréalité” de Marilyn Monroe.
Lorelei (Marilyn Monroe) et Dorothy (Jane Russell) sont deux amies, deux très belles jeunes femmes qui ne partagent pas la même conception de l’amour : l’une n’est amoureuse qu’à la condition que son prétendant soit très riche (le mot “diamant” la fait sursauter) tandis que pour l’autre seule compte la beauté physique. Tout le génie des Hommes préfèrent les blondes est de se contenter de ces seules caractéristiques pour tout commentaire psychologique.
Les femmes sont superficielles et vénales, les hommes libidineux, et tout ce joyeux monde joue au chat et à la souris sur un paquebot vers l’Europe. C’est une utopie de légèreté : des personnages esquissés d’un seul trait, d’une telle inconsistance psychologique qu’ils s’en trouvent totalement déréalisés, comme sortis tout droit d’un cartoon de Tex Avery. Hawks poussera cette légèreté cartoonesque jusqu’à atteindre l’expérimentation, la prolongeant jusqu’à l’idiotie, jusqu’à la stupidité généralisée.
Lors des mémorables numéros musicaux, on a le sentiment que les deux jeunes femmes chantent de se sentir si légères, non embarrassées par une quelconque névrose, baignant dans un paradis futile, caricaturalement hollywoodien, où seuls les hommes et les diamants sont importants.
L’exact contre-emploi de sa vie intime
C’est là toute l’intelligence d’Hawks, d’avoir compris mieux que les autres que le jeu d’actrice de Marilyn Monroe serait l’exact contre-emploi de sa vie intime, d’avoir filmé une actrice géniale incarnant un personnage totalement idiot sans que celui-ci ne soit sacrifié ou moqué.
On pourrait difficilement trouver plus beau commentaire sur le film que celui de Hawks lui-même parlant de Marylin dans le livre d’entretiens que lui a consacré Joseph McBride : “Il n’y avait pas la moindre parcelle de réalité en elle. Tout était complètement irréel. Ils ont essayé de lui faire jouer des rôles réalistes dans certains films, et les films ont été des désastres. Gentlemen Prefer Blondes est le premier film où elle a été vraiment bonne, et ensuite ils n’ont pas eu l’intelligence de s’accrocher à ça.” Murielle Joudet
Les hommes préfèrent les blondes d’Howard Hawks (E.-U., 1953, 1 h 31, reprise)