En 1965, le réalisateur Bruce Brown emmène de jeunes surfeurs autour du monde. Un docu tout à la gloire d’un nouveau mode de vie hédoniste.
Du surf, du soleil et des vacances : on ne pouvait évidemment pas rêver meilleur film de saison que The Endless Summer, et ça n’a pas échappé au distributeur de films Carlotta, qui en présente une version restaurée.
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Au mitan des années 1960, le réalisateur Bruce Brown, déjà auteur de quelques docus sur la planche, a l’idée de mettre la surf culture à l’épreuve d’un tour du monde, loin de ses spots historiques d’Hawaii et de la Californie. L’objectif : inventer un été sans fin, émancipé des variations saisonnières, en suivant comme une seule vague un périple sur les ondes de l’hémisphère Sud.
Hédonisme absolu
Brown emmène deux jeunes hommes autour du globe, sur des plages inconnues, côtes totalement vierges ou peuplées mais non encore acquises au phénomène surf et au mode de vie révolutionnairement désinvolte qui l’accompagne.
Une caméra 16 mm filme leurs contacts avec les populations locales et les quelques touristes, leçons de glisse, safaris, repas et, bien sûr, leurs sessions dans les vagues. Une voix off blagueuse mais empreinte de pédagogie (expliquer les gestes, les termes techniques, les spécificités locales…) commente ces images d’un hédonisme absolu.
A chaque étape du voyage, le film de Bruce Brown revendique une aspiration à l’ethnographie – même si ce n’est pas celle d’un explorateur averti, aspirant à un regard neutre : c’est en bons Californiens que nos plagistes arrivent sur les plages d’Accra, capitale ghanéenne, où Brown affirmera qu’“on n’y a jamais vu de Blancs” (en 1965, c’est du OSS 117 que de sortir une énormité pareille).
The Endless Summer n’en devient pas antipathique pour autant : ses raccourcis culturels, sa façon de tout comparer à un référentiel américain, relèvent moins de l’arrogance impérialiste que de la pure candeur.
Un pur éclat de “sensation”
Car, au fond, tout est sauvé par la simple et belle idée qui a mis ces surfeurs sur la route : la poursuite d’un idéal, idéal de loisir bien sûr, mais idéal plus élevé et spirituel qu’un simple programme de vacances. “Only a surfer knows the feeling”, dit cet adage qu’on lit et entend souvent dans les bastions de la surf culture : la planche touche à un état de grâce, un pur éclat de “sensation”, comme une révélation de la nature faite à celui qui glisse sur elle.
Il faut entendre Brown décrire, la voix presque tremblante, cette “vague parfaite” découverte en Afrique du Sud, déroulant son eau avec une régularité et une harmonie qui paraissent celles d’une machine (on pense à la vague artificielle récemment construite par la superstar Kelly Slater).
Certes, tout n’est pas forcément pur : “Only a surfer knows the feeling” est aussi le slogan d’une grande marque de surfwear, et, déjà en 1965, le ton étrangement publicitaire de The Endless Summer (Brown décrit moins le mode de vie des jeunes Californiens qu’il ne le vend) initie cet entre-deux d’émancipation et de consumérisme, de lâcher-prise et d’industrie touristique propre à la surf culture. Reste qu’on n’a pas vu en 2016 de film plus épicurien que celui-ci.
The Endless Summer de Bruce Brown (E.-U., 1966, 1 h 35, reprise)
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