Un naufragé est coincé sur une île gardée par une tortue fabuleuse. Un beau conte, fruit de la collaboration inédite entre l’animation européenne et les studios Ghibli.
La Tortue rouge marque une étape importante dans l’histoire du cinéma d’animation : la rencontre entre l’animation européenne (et des producteurs comme Arte, Why Not et Wild Bunch, entre autres) et les célèbres studios japonais Ghibli (qui n’avaient jamais travaillé avec un autre studio, pas même japonais).
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Isao Takahata, le plus grand animateur nippon avec Miyazaki, est également le directeur artistique du film du Néerlandais Michaël Dudok de Wit – dont le scénario a été écrit avec la collaboration de la cinéaste Pascale Ferran. Plus étonnant : ce sont les gens de Ghibli qui ont fait appel il y a dix ans à Dudok de Wit, qui s’était fait connaître en 1994 avec un court métrage d’animation, Le Moine et le Poisson, ayant triomphé dans les festivals du monde.
Une histoire simple, presque biblique
La Tortue rouge, film sans aucun dialogue, bercé par la musique parfois un peu omniprésente de Laurent Perez Del Mar, raconte une histoire extrêmement simple, presque biblique, toute métaphorique : celle de la vie. Un naufragé (aux traits neutres, pas du tout dans la veine des studios Ghibli, avec ses grands yeux bien connus) se retrouve sur une île déserte. Il sympathise avec des crabes. Il tente d’abord de s’échapper de l’île en construisant des radeaux de fortune.
Mais ils se font tous détruire par une créature étrange, qui va s’avérer être une grande tortue rouge. Elle le ramène sans cesse vers l’île. Cette créature, l’altérité, se fait femme pour lui, et ils vont avoir un enfant. Puis un tsunami – magnifique scène – s’abat soudain sur l’île…
Ici, l’homme n’est que de passage
Tout est simplicité et beauté, humanité et universalité dans ce récit d’une vie humaine à travers ses multiples étapes, obstacles et découvertes : la solitude, l’étrangeté du monde et de l’autre, l’amour, la vieillesse et mort, en passant par l’enfant qui grandit et qui lui aussi découvre le monde.
On notera, dans un geste d’une belle épure et comme on aurait pu s’y attendre, que jamais le duo puis trio ne s’installe, ne construit des infrastructures (même une simple cabane) ou ne colonise ce territoire sauvage, comme auraient pu le faire des Robinson Crusoé modernes. Non, ici tout reste inviolé, l’homme n’est que de passage.
La Tortue rouge a reçu le prix spécial Un certain regard lors du dernier Festival de Cannes. Dudok de Wit, vient, à plus de 60 ans, de réaliser un très beau film, pour adultes et enfants de tous âges, sans prêchi-prêcha.
La Tortue rouge de Michaël Dudok de Wit (Fr., Belg., Jap., 2016, 1 h 20)
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