Avec un concert de plus de deux heures, Robert Smith et ses acolytes ont revisité tous leurs meilleurs morceaux – ou presque. L’occasion de se rendre compte à quel point le groupe est l’une des légendes vivantes les plus influentes de ces dernières décennies.
Une foule absolument immense se presse devant la Grande Scène. Il est 21h, Jeanne Added a terminé son concert depuis un petit moment déjà, et voilà que les Cure rentrent en scène. Robert Smith est le dernier arrivé, et il jette un peu timidement des sourires à la ronde, en saluant le public du bout de la main. D’emblée, les premières notes de Plainsong retentissent à travers la nuit tombante. En dépit d’un son un peu boiteux – on y reviendra – quelque chose se passe tout de suite dans le public. Même les moins de 30 ans, qui pour la plupart ne connaissent des Cure que certains morceaux tirés de playlists MTV, se sentent obligés de rentrer dans le concert.
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Robert Smith a considérablement changé sur le plan physique : il est un peu bouffi et a forcément vieilli, le maquillage ne lui sied franchement plus trop, mais laissons aux cyniques le soin de se foutre de lui. Ce qui importe, c’est que même après plus de 40 ans de carrière, sa voix n’a pas évolué d’un chouilla, et qu’il dégage toujours ce truc troublant, à la fois inquiétant et mélancolique. Impression qui se confirme lorsque le groupe lance Pictures Of You, l’une de ses plus belles chansons.
Là, on est obligés de dire qu’on regrette vraiment le mix de l’ensemble. La batterie est complètement étouffée, les guitares beaucoup trop en retrait. Quelques plaintes se font d’ailleurs entendre dans le public, mais le groupe continue à faire ce pour quoi il est là : enchaîner les titres pour un concert sous forme de best-of.
Et ainsi, A Night Like This, Lovesong, Burn sont balancées quasiment sans interruption, exceptées quelques blagues que Robert Smith balbutie dans le micro, dont on ne saisira pas trop le sens ; et quelques mots doux à propos de la France (on se doute que tous les pays ont eu droit à leur dédicace pendant la tournée, mais Albert Camus a quand même inspiré la toute première chanson des Cure, Albert Camus était français, donc on décide de croire à la sincérité du chanteur et on se permet un petit cocorico).
L’un des climax du concert est bien entendu atteint sur Fascination Street, l’un des plus gros succès américains du groupe. Le morceau est parfaitement revisité, et son refrain est repris en chœur par nombre de quinquagénaires à t-shirts noirs, aux crinières certes raréfiées mais toujours hirsutes. Les mêmes chœurs seront également omniprésents sur cette géniale partie d’orgue, ces trois petites notes qui introduisent In Between Days.
Les Cure jouent désormais depuis plus d’une heure et demie et on a à peine le temps de se demander si, comme nous, ils commencent un peu à fatiguer, que des lumières vert poison viennent percer la nuit. C’est clairement l’instant de gloire de Simon Gallup, bassiste historique de la formation, puisqu’on arrive à A Forest. Le morceau est impeccablement interprété, mais comment pourrait-il en être autrement ? Construit sur des bases à la simplicité déconcertante, ce n’est pas un hasard s’il s’agit du tout premier vrai succès des Cure, à l’époque où Robert Smith n’était qu’un jeune garçon aux cheveux courts et aux chemises boutonnées jusqu’au col.
Ensuite, le groupe n’a plus qu’à dérouler. Un bref détour par la fiévreuse Shake Dog Shake, la conclusion du premier round sur l’immense Disintegration, et le rappel est lancé avec Lullaby.
Pas forcément la meilleure chanson du groupe mais enfin, pourquoi pas. Rodés, les Cure ont décidé de mettre cet Encore sous le signe de leurs chansons les plus joyeuses et entraînantes : The Walk, Friday I’m In Love, Close To Me ou encore Why Can’t I Be You. Tout le monde est heureux, l’atmosphère devient presque foraine et du coup, l’ensemble devient forcément plus ennuyeux – avouez que le cynisme vous avait un peu manqué. Et puis les accords de Boys Don’t Cry lancent des trémolos dans la poitrine des spectateurs. Forcément. On voit mal quelle autre chanson aurait pu être choisie pour conclure ce concert, et il faut dire que ce point final est parfait.
Robert Smith et ses acolytes quittent la scène avec (encore) des mots d’amour pour notre pays, et laissent une impression diffuse dans le parc de Saint-Cloud. La fièvre de la jeunesse s’est évidemment perdue en route, les Cure sont certes devenus ce qu’on appelle un groupe à best-of, mais ils n’en demeurent pas moins l’une des formations les plus influentes des dernières décennies. Et Robert Smith est définitivement une sorte de légende vivante, un monstre sacré qu’il convient de coiffer d’une couronne de laurier – même si sa coupe de cheveux ne le permet pas trop.
Pour en savoir davantage sur l’immense carrière des Cure, notre hors-série est toujours disponible en kiosque, et à cette adresse.
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