Revenant sur des années de radio passées à tendre le micro à sa génération, Aurélie Charon récapitule dans son livre le moteur qui la pousse à croire aux vertus du collectif.
Aurélie Charon, c’est d’abord une voix. Douce, rieuse, juvénile. Du même âge que ceux qu’elle interviewe aux quatre coins du globe sur Radio France depuis une dizaine d’années. Puis, c’est une silhouette, longiligne, qui offre à ses intervenants une extension des émissions de radio sur des plateaux de théâtre où ils se rencontrent et croisent leurs expériences. Dans Radio live, on la retrouve avec sa complice de radio, Caroline Gillet, aussi accompagnée d’Amélie Bonnin, à l’image où chaque représentation met en scène des récits différents dont le seul point commun est générationnel. Qu’est-ce que ça fait de naître et de grandir dans ce monde-là, post-XXe siècle, au futur incertain et au présent malmené ?
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Enfin, c’est l’auteure d’un livre au titre qui lui ressemble, déterminé et optimiste : C’était pas mieux avant ce sera mieux après. Une élégie au sentiment du collectif que résume cette phrase de Faïza Guène citée en épigraphe : “Ceux qui espèrent ont toujours une longueur d’avance.”
A contre-courant
La chronologie ne compte pas dans ce livre, découpé par chapitres comme autant de notions recherchées, découvertes ou rencontrées au gré de ses voyages en écoutant les voix de sa génération à Alger, Beyrouth, Jérusalem, Istanbul, Oslo, Berlin, Marseille, Moscou, Téhéran, Gaza. En Ouzbékistan, en Bosnie, au Rwanda. Celui consacré à la radio ne compte que deux pages, juste pour inscrire l’enjeu du métier de journaliste, un passeur engagé : “Pendant sept ans, j’ai eu la chance de m’inviter dans des chambres, sur des canapés, dans des salons. (…) D’entrer en conversation avec ceux qui vont à contre-courant. De dire aux auditeurs : attention, il y a quelqu’un qui vous parle, ce n’est pas l’histoire, ce n’est pas la politique, ce n’est pas la France, c’est quelqu’un qui parle. (…) Je suis partie interroger ceux qui avaient mon âge, mais ailleurs. Loin. Les trois premières années, avec une amie, toutes les suivantes seule avec mon enregistreur Nagra.”
L’attrait de ce livre, c’est qu’enfin on entend la voix d’Aurélie Charon, sa voix intime, ses réactions aux récits qu’elle recueille, son engagement pour faire entendre ceux qui ne capitulent pas, font la chasse aux préjugés, s’organisent pour modeler un monde à leur image. Eclairé, tolérant, égalitaire, fraternel, féministe, pacifiste. Utopique ? Non, juste différent : “Comment à l’intérieur d’une même famille, sur une même ligne de départ, mêmes parents et même éducation, un être a soudain un tel désir de liberté qu’il renverse tout ce qui a été prévu ? Un être ne se satisfait pas de ce qu’il a. Pas assez. Pas comme ça. Refuse les mondes séparés et passe de l’un à l’autre.”
C’était pas mieux avant ce sera mieux après (L’Iconoclaste), 312 p., 19 €
Radio live Conception Amélie Bonnin, Aurélie Charon, Caroline Gillet, Festival d’Automne à Paris, en novembre et décembre
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