La BBC et Sky News épinglées pour des reportages qui déshumanisent les migrants

Micro en main, un·e journaliste à bord d’un bateau essaie de questionner des migrants en pleine traversée des eaux anglaises. Ces images sont issues de reportages réalisés par les chaînes de télévision BBC et Sky News pour illustrer l’augmentation des traversées de migrants entre les côtes françaises et anglaises.

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Le lundi 10 août, c’est la matinale BBC Breakfast qui diffusait un direct depuis un bateau. Son journaliste, Simon Jones, expliquait aux téléspectateurs en parlant de migrants à bord d’un canot pneumatique : « Nous les avons vus essayer d’évacuer l’eau du bateau, ils utilisent un récipient en plastique pour essayer de le vider. Évidemment le bateau est surchargé – c’est assez dangereux, rien que le nombre de personnes à bord ».

"They're using a plastic container to try to bail out the boat"
Live on #BBCBreakfast @SimonJonesNews found another migrant boat attempting to cross the Channel. The group say they're from Syria. https://t.co/jidwhEOcIJ pic.twitter.com/Z62i9AmmYm

— BBC Breakfast (@BBCBreakfast) August 10, 2020

Dès le lendemain, Sky News produisait sa version du reportage, elle aussi en direct de la mer agitée. S’approchant d’une petite embarcation, on peut y voir la journaliste Ali Fortescue se pencher, tendant son micro, pour questionner un groupe de dix migrants. Alors qu’on entend crier « s’il vous plaît, pas de caméra », elle continue à commenter, soulignant le caractère « très, très dangereux » du voyage à travers la Manche.

Sky News is following a fourth boat attempting to carry migrants across the English Channel into the UK this morning.

Read more on this story here: https://t.co/6JOWbLK4ZM pic.twitter.com/YFh82ELYIl

— Sky News (@SkyNews) August 11, 2020

“Une émission de télé-réalité grotesque”

Si les deux journalistes ont bien précisé face caméra qu’ils allaient s’assurer que les embarcations terminent leur périple en sécurité, les images ont déclenché une vive polémique sur les réseaux sociaux. Les tweets accusant les médias de déshumaniser des personnes en train de risquer leur vie se sont multipliés.

Why are these poor, desperate people being covered like wildlife at a game park? They’re literally asking not to be filmed but they’re not important enough so their objections don’t matter https://t.co/ooyzj7ndgd

— Larry Madowo (@LarryMadowo) August 11, 2020

« Pourquoi ces pauvres gens désespérés sont-ils couverts comme des animaux sauvages dans un parc animalier ? Ils demandent littéralement à ne pas être filmés, mais ils ne sont pas assez importants donc leurs objections sont sans importance »

La députée travailliste Zarah Sultana a déclaré : « Nous devrions veiller à ce que les gens ne se noient pas en traversant la Manche, et non pas les filmer comme s’il s’agissait d’une émission de télé-réalité grotesque ».

We should ensure people don't drown crossing the Channel, not film them as if it were some grotesque reality TV show. https://t.co/EI6sYgpCJF

— Zarah Sultana MP (@zarahsultana) August 11, 2020

Pour Stephen Farry, le leader du Parti de l’Alliance d’Irlande du Nord, « il ne s’agit pas de journalisme ou de reportage éthique ». Il a dénoncé le « voyeurisme » et « la capitalisation sur la misère » des migrants de ces deux directs.

This is not ethical journalism or reporting. Yesterday @BBCNews and today @SkyNews. It is voyeurism and capitalising on misery. Media should be seeking to hold @ukhomeoffice to account, and the dark forces fuelling this anti people agenda. https://t.co/vQsMza0msw

— Stephen Farry MP (@StephenFarryMP) August 11, 2020

Les chaînes mises en cause n’ont pas tardé à réagir à ce tollé médiatique. « Ce reportage illustre de façon frappante les risques importants que certaines personnes sont prêtes à prendre pour atteindre le Royaume-Uni », s’est justifié un porte-parole de la BBC. « La traversée de la Manche est un sujet d’une importance capitale et nous nous efforçons toujours de le couvrir avec sensibilité », a-t-il ajouté.

Chez Sky News même réponse. Les traversées de la Manche sont « un événement majeur » qu’ils continueront à couvrir « de manière responsable et humaine ».

Ces dernières semaines, le nombre de ces voyages dangereux entre la France et l’Angleterre a augmenté. Au moins 235 personnes y ont été interceptées jeudi 6 août, un nouveau record journalier.

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