L’égérie de Hirokazu Kore-eda, Kirin Kiki, qui fut aussi une grande figure populaire de la télévision japonaise, est décédée ce 15 septembre des suites d’un cancer. Elle laisse derrière elle une filmographie jalonnée par des questionnements familiaux propres au Japon contemporain.
Icône du cinéma japonais, star du petit écran inscrite dans le quotidien des téléspectateurs, mais aussi femme de combat contre le cancer, l’actrice Kirin Kiki est décédée à Tokyo ce 15 septembre à l’âge de 75 ans.
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De la vedette de télévision à l’égérie de Kore-Eda
Née au lendemain de la guerre, dans un Japon tout juste défiguré et en transition, Kirin Kiki fait ses débuts dans les années 1960, dans une troupe de shingeki, théâtre japonais d’avant-garde. A l’époque, celle qui s’appelle encore Yuki Chiho se fait surtout connaître grâce à la télévision, dans des feuilletons qui forgeront son image populaire : elle est l’héroïne de Shichinin no Mago, mais aussi Terauchi Kantaro Ikka. Très vite, son image médiatique et ses rôles se nourrissent mutuellement : son aura chaleureuse façonne sa persona, et c’est surtout dans le rôle de grand-mère malicieuse que les réalisateurs la mettront à l’honneur. En 2011, elle joue dans Chronicle of My Mother, qui gagne le Prix spécial du jury au Festival des Films du Monde de Montréal, et reçoit le prix de la meilleure actrice pour l’ensemble de sa carrière de la part de la Japan Acamedy.
Mais c’est sa collaboration tardive avec le réalisateur Hirokazu Kore-eda qui a sans doute donné lieu à ces plus belles compositions : dans Notre petite soeur et Après la tempête, elle incarne un cinéma traversé par la question de la filiation, thème éminemment important dans le Japon contemporain, que Kore-eda a de nouveau exploré dans son dernier film, Une affaire de famille, couronné de la Palme d’or 2018. Kirin Kiki y interprète le rôle principal, comme un adieu cinématographique.
Un visage comme une page blanche
Sans doute parce qu’elle incarnait davantage un type de personnage, jouant presque insensiblement le même rôle à chaque fois, ses compositions renvoyaient à une universalité aiguë, dont le fil blanc constituait la figure de la grand-mère, pilier du foyer japonais. En ce sens, Kirin Kiki prolongeait le jeu d’acteurs tels que ceux qui habitaient le cinéma d’Ozu, caractérisé par un degré zéro de l’interprétation, une impassibilité permettant une profondeur muette. Un visage comme une page blanche, dans le refus de tout expressionnisme et de toute psychologisation. Kirin Kiki était infailliblement une grand-mère ; et reprenant ce rôle là où elle l’avait laissé chaque fois, elle était devenue, en dehors même de ses films, un visage maternel pour le Japon.
Une affaire de famille de Hirokazu Kore-eda sortira le 12 décembre 2018 en France.
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