La gloire et la chute du footballeur à la personnalité tourmentée dans un documentaire biographique axé sur ses années au SSC Napoli. Une matière bouillonnante, qui transcende un système formel monotone.
A l’origine de ce documentaire sur la légende argentine du football Diego Maradona, il y a l’acquisition par Paul Martin, producteur d’autres films sur des stars du ballon rond (Ronaldo et Make Us Dream), des droits d’un fonds d’images inédites, tournées entre 1981 et 1987 dans l’intimité de Diego par l’Argentin Juan Laburu et l’Italien Luigi Martucci, à la demande de l’agent du joueur.
Pour trier, ordonner et donner une forme aux cinq cents heures de rushs acquises, Paul Martin a fait appel à une valeur sûre : Asif Kapadia, poids lourd de l’écriture documentaire à partir d’images d’archives, connu pour l’oscarisé Amy (2015) et Senna (2010), autre documentaire sportif.
De ce point de vue, Diego Maradona ne déçoit pas, il est bien le blockbuster documentaire attendu, aussi passionnant pour le récit qu’il restitue que monotone de par la forme qu’il privilégie pour le raconter. Centré donc sur les années napolitaines de la carrière en dents de scie d’un des plus grands footballeurs de l’histoire, le documentaire survole son enfance passée dans un bidonville de Buenos Aires, passe par Boca Juniors, puis le FC Barcelone et s’envole enfin pour Naples, où Diego est transféré pour un montant record de 12 millions de dollars.
Dans la ville italienne, le meneur de jeu argentin est élevé au rang de rockstar, avant de devenir le dieu vivant de tout un pays lors de la Coupe du monde de 1986, puis de perdre de sa superbe à partir de la défaite de l’Argentine en finale quatre ans plus tard.
Asif Kapadia enfonce brillamment toutes les portes ouvertes de la bio du bel hidalgo. Sa trajectoire en forme de rise and fall est elle-même perturbée d’une multitude de microvariations. Chaque succès sportif est ainsi contrebalancé par sa dépendance à la cocaïne, ses frasques sur le terrain, l’enfant né d’une relation extraconjugale qu’il refuse de reconnaître, ses liens avec la Mafia, son infidélité chronique…
Le film parvient ainsi à rendre compte d’une vie tourbillonnante et d’une personnalité d’hédoniste charismatique et de génie capricieux, certes réduite à la psychologie stevensonienne du bon docteur Diego et du méchant mister Maradona.
Plus que l’horrible film que lui avait consacré Emir Kusturica en 2008, Diego Maradona cerne au plus près la fascination sportive, physique et mentale qu’a exercée le footballeur durant les sept ans qu’a duré son règne qui s’étendait des faubourgs de Naples au reste de la planète football.
Mais ce qui fascine n’est en définitive pas tant cette vie cyclothymique que la façon dont Maradona s’est sans cesse livré aux caméras, hors et évidemment sur le terrain. Comme dans Amy, le film dresse le portrait d’une captivante chair à image et de son devenir tragique.
Diego Maradona d’Asif Kapadia (R.-U., 2019, 2h10)