Derek Bailey/Franz Hautzinger

Réfractaire aux clichés comme aux dogmes, le guitariste britannique Derek Bailey ne s’est jamais soucié des esthétiques imposées par la mode et ses diktats. C’est tout naturellement que son esprit rebelle l’a sans cesse poussé à préférer au formalisme figé l’aventure de l’improvisation, et sa nature par essence éphémère ? ce qui est pour beaucoup dans la singularité d’un parcours sans fautes. Continuant d’ignorer tous les plans des virtuoses du manche avec un acharnement qui force l’admiration, Derek Bailey ne cesse de confronter sa pratique, autour du monde, avec des musiciens passionnés comme lui par l’improvisation.

            {"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
          

Pas une semaine ne passe sans que sorte un disque intéressant et fruit de collaborations plus ou moins récentes. Ce mois-ci paraissent quasi simultanément un trio datant de 1992 avec le saxophoniste Frode Gjerstad et le batteur John Stevens, un duo avec le rythmicien Ingar Zach (2000), et un autre avec le trompettiste autrichien Franz Hautzinger. Ce dernier se révèle être un compagnon idéal dont l’instrument, à quart de ton, permet un travail singulier et minimal basé sur le souffle et le son plutôt que sur le phrasé, parfois relevé par de discrets effets électroniques. Tandis que l’un s’exprime tout en murmures et bruits de pistons effleurés, jouant avec les limites extrêmes de l’écoute, l’autre tisse sa toile. A 72 ans, alors que ses débuts sont loin, aux côtés de Gavin Bryars au sein du Joseph Holbrooke Trio, en 1963, le radicalisme du propos et la capacité à se remettre en question demeurent intacts. Belle prouesse que cet éternel jeune homme reproduit également sur l’extraordinaire Ballads (encore un !) qui sort parallèlement sur le label de John Zorn.