[25 ans d’Inrockuptibles hebdo] Sur son album Løve, Julien Doré déclarait sa flamme à Michel Platini. En avril 2014, le chanteur rencontre enfin son idole, alors président de l’UEFA. Nous étions là pour passer le ballon.
Michel, comment avez-vous découvert la chanson que Julien a écrite sur vous, intitulée Platini ?
Michel Platini — Sur le net, je crois. On m’en avait parlé, j’étais curieux. Et content qu’un jeune chanteur s’intéresse à moi. Que Marcel Amont ou Enrico Macias fassent une chanson sur moi dans les années 1980 m’aurait moins étonné (rires). Mais qu’un garçon de 30 ans, tout juste né quand j’ai arrêté ma carrière, ait envie de me consacrer une chanson, ça m’a surpris et flatté. J’aime beaucoup la chanson parce qu’elle ne correspond pas à la façon dont on parle en général du foot. Il y a quelque chose de doux, de tendre, cet imaginaire un peu décalé qui est celui de Julien…
Julien Doré — Je ne sais pas si j’aurais pu écrire sur un joueur dont je serais le contemporain. La distance générationnelle me rendait plus libre pour aller vers quelque chose d’imagé et essayer de rendre compte de façon poétique de l’un des plus grands mythes du foot.
C’est quand même curieux d’écrire sur un joueur qu’on n’a pas vu jouer…
J. D. — En fait, mon album Løve ne contient que des chansons d’amour. Et Platini en est une. Mais il fallait que je pense à une légende comme Michel pour que les mots me viennent. Ensuite, pour le refrain, j’ai imaginé croiser le prénom Michel avec le texte lui-même mythique des Beatles. Ça a donné “Michel, ma belle…”.
Ça vous a surpris qu’on parle de vous au féminin ?
M. P. — Ben, j’ai compris que c’était une référence à Michelle des Beatles, qui pour le coup n’a pas été écrite pour moi ! Donc non, pas plus que ça. Vous savez, Julien, que j’ai eu deux disques d’or ? Deux disques d’or et trois Ballons d’or ? (il se marre).
J. D. — Ah non…
M. P. — Le premier, c’était avec Les Restos du cœur, leur premier titre, écrit par Jean-Jacques Goldman. Le second en Italie, avec d’autres joueurs, pour une chanson de Noël. Je ne sais pas chanter et j’ai eu deux disques d’or !
J. D. — Oh vous savez, vous n’êtes pas le seul ! (rires)
…
Ton intérêt pour le foot remonte à quand, Julien ?
J. D. — J’ai grandi dans une petite ville près de Montpellier, Lunel. Donc j’ai beaucoup suivi le club de Montpellier.
M. P. — Ça va, c’est des copains. Je suis très proche de Loulou (Louis Nicollin, alors président du club – ndlr).
J. D. — Quand j’ai eu ma caisse, j’allais tous les week-ends à la Mosson (le stade du club de Montpellier – ndlr) voir des matchs. J’ai fait beaucoup de futsal. J’ai monté un club et on faisait des compétitions. J’ai arrêté quand je suis entré aux beaux-arts. Ça devenait compliqué de faire les deux et, comme j’étais gardien, j’en avais un peu marre de me prendre tous ces ballons dans la gueule.
Gardien de but de futsal, c’est comme au hand, les mecs te loupent pas. Mais ça me manque. En tournée, dans le car, en été, il y a toujours un ballon. On se fait des matchs avec Arman Méliès, qui est un grand supporter de Saint-Etienne, et mon autre guitariste, Darko Fitzgerald, qui supporte le PSG.
“Les mécanismes qui font qu’une équipe perd ou gagne sont irrationnels” Julien Doré
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Avec Julien, en préparant celui-ci, on parlait de votre entretien croisé avec Marguerite Duras, publié en 1987 dans Libération…
M. P. — Il a vraiment marqué, on m’en parle encore régulièrement ! A l’époque, je n’aurais jamais cru. Je n’ai pas compris grand-chose à ce qu’elle disait…
J. D. — Elle avait des visions. C’est ça qui était beau ! Il y a une phrase très belle que vous lui aviez répondue. Vous disiez que le football n’est pas un sport logique. Il n’a pas de lois. Les mécanismes qui font qu’une équipe perd ou gagne sont irrationnels. Et pourtant, tout le monde passe son temps à essayer de les expliquer…
M. P. — Bien sûr. C’est le seul sport, je crois, où tu peux être le meilleur sur le terrain pendant quatre-vingt-dix minutes et pourtant perdre. En tennis, si t’es le meilleur, tu gagnes…
J. D. — Ah oui ! En musique, on a ça aussi : ça s’appelle les Victoires de la musique. Même si t’es le meilleur, tu perds (rires).
Lire l’intégralité de l’entretien dans le n° 961 d’avril 2014