Voilà une dizaine d’années que cet ancien DJ, surnommé “Le Rootsman” ? de son vrai nom John Bolloten ?, est en Angleterre celui qui, du dub jamaïcain, a choisi l’option la plus nomade. Avec ses basses thermonucléaires, ses rythmes hachés et son écho pulsar, le dub, plus qu’une musique, serait plutôt un mode musical qui […]
Voilà une dizaine d’années que cet ancien DJ, surnommé « Le Rootsman » ? de son vrai nom John Bolloten ?, est en Angleterre celui qui, du dub jamaïcain, a choisi l’option la plus nomade. Avec ses basses thermonucléaires, ses rythmes hachés et son écho pulsar, le dub, plus qu’une musique, serait plutôt un mode musical qui amplifie l’exil indissociable du reggae (et de ceux qui le jouent), jusqu’à lui attribuer une dimension spatiale, universelle au sens le plus large, éveillant dans l’inconscient de chacun la certitude d’appartenir à une vaste diaspora perdue dans l’immensité cosmique : la race humaine ! Ainsi, du voyage humain, le dub s’intéresse moins aux origines, et aux divergences qu’elles impliquent, qu’à une destination forcément commune.
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Contrairement à ses deux précédents albums, la compilation de remixes Roots Bloody Rootsman et Realms of the Unseen, enregistré dans son studio Third Eye, ce New Testament accorde la priorité au verbe. Avec le concours d’évangélistes rastas de la pointure de Sandeeno, Earl 16 ou U Brown, le renfort de DJ bien apocalyptiques comme Cudjoe Banton ou Daddy Freddy, et même la participation de quelques anges (ce vieux Mike Brooks toujours en voix !), ce « Nouveau Testament » est autant un repaire de mutants qu’un manuel de survie.
Un peu comme Massive Attack, Le Rootsman fait la somme de toutes les transfigurations récentes de la musique jamaïcaine. Il en utilise le pouvoir, la menace, l’orgueil, que portent tour à tour ses treize invités, puis distille lignes de basse telluriques et programmations paranoïaques. Ce parcours à rebours (de l’instrumental au vocal) n’a pourtant rien d’une régression. Comme peu de productions jamaïcaines l’ont réussi ces derniers temps, ce disque a le mérite d’entrouvrir les portes de cet arrière-monde, en perpétuelle expansion à mesure qu’une multitude croissante d’individus, joyeux orphelins du système, viennent y trouver refuge. Y retrouver leur propre ombre.
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