Le directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) Martin Hirsch a envoyé une lettre au président de l’Assemblée nationale dans laquelle il qualifie de “faux témoignage” les propos tenus par l’infectiologue lors de son audition devant la commission d’enquête sur la gestion de crise du Covid-19.
Didier Raoult, ardent et controversé défenseur de l’hydrochloroquine, se retrouve à nouveau au cœur d’une polémique. Mercredi 1er juillet, l’AFP a eu accès à la copie d’une lettre envoyée le 26 juin dernier par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) à destination de Richard Ferrand, président de l’Assemblée nationale. Dans celle-ci, le directeur général de l’AP-HP Martin Hirsch critique les propos tenus par le professeur Raoult le 24 juin devant la commission d’enquête sur la gestion de crise du coronavirus : “Ces déclarations, qui mettent gravement en cause l’AP-HP, faites sous serment, me semblent s’apparenter à un faux témoignage.”
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Deux éléments évoqués par l’infectiologue lors de son audition devant les députés sont ciblés par Martin Hirsch. D’abord, son estimation des taux de décès de malades en réanimation, mais aussi ce que le médecin a dit au sujet d’un patient chinois de 80 ans décédé mi-février à Paris. “Il me semble essentiel (…) que les travaux de la commission ne puissent être fondés sur des éléments factuellement faux, et que les suites qui s’imposent puissent être données”, écrit ainsi le directeur général de l’AP-HP.
>> A lire aussi : Entre angoisses et incertitudes, le monde de la culture se relèvera-t-il de la crise entraînée par le Covid-19 ?
Désaccord sur les chiffres
Au sujet du taux de mortalité dans les services de réanimation, le directeur de l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée-Infection de Marseille, pour qui l’hydrochloroquine est efficace contre le Covid-19, avait affirmé : “La mortalité dans les réanimations ici, dans ce travail toujours, est de 43 %. Chez nous (à Marseille, où il a utilisé l’hydrochloroquine, ndlr), elle est de 16 %”, sans donner plus de précisions par rapport à la provenance de ces chiffres. Avant d’ajouter : “Le soin est passé au second plan.”
Martin Hirsch assure de son côté que “nous n’avons aucune donnée qui place à 43 % la mortalité dans les réanimations de l’AP-HP” et qu’“il n’y a à ce jour aucune étude publiée qui analyse comparativement les taux de mortalité en réanimation, évalués dans des conditions contrôlées, entre les hôpitaux parisiens et marseillais”. L’AFP a contacté l’entourage de l’infectiologue, qui a renvoyé l’agence vers des résultats donnés par le registre Reva (Réseau européen de recherche en ventilation artificielle) exposés dans un “rapport de la cellule de crise de l’AP-HP du 14 avril”. Dans cette étude datant d’il y a deux mois et demi et dont les résultats coïncident avec le pic de l’épidémie en France, le taux de décès en réanimation était considéré de 43 % à l’AP-HP, et de 41 % dans les hôpitaux hors AP-HP.
Un chiffre également remis en cause par Antoine Vieillard Baron, anesthésiste réanimateur à l’hôpital Ambroise-Paré de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), qui a déclaré ceci à BFMTV : “Parler de mortalité brute n’a aucun sens puisque la mortalité est liée à la sévérité des malades. Plus les malades sont admis dans des cas sévères, plus leur mortalité attendue va être élevée. On ne peut pas comparer deux mortalités sans avoir la typologie des patients.”
Deux versions sur le cas d’un patient
Le deuxième élément concerne cette fois le cas d’un patient chinois de 80 ans, premier mort du Covid-19 en France. Didier Raoult a en effet laissé entendre que l’hôpital parisien en charge de ce dernier, qu’il dit être “la Pitié-Salpêtrière”, n’avait pas bien fait son travail. “Il n’a pas été testé. Santé Publique a dit ‘il ne faut tester que les gens de Wuhan, qui ont de la fièvre et de la toux.’ Il est rentré chez lui et est revenu sept jours plus tard, après avoir contaminé sa fille, et il est venu mourir dans ce même hôpital”, fustigeait-il.
Pourtant, Martin Hirsch conteste cette accusation : “Le seul patient chinois de 80 ans auquel peut faire référence le Pr Didier Raoult a été admis le 25 janvier 2020 à l’hôpital européen Georges Pompidou. Il n’a jamais été renvoyé chez lui”, assure-t-il.
>> A lire aussi : Quand le déconfinement devient source d’angoisses : “J’ai perdu l’habitude de voir des humains”
{"type":"Banniere-Basse"}