Les débuts convaincants du musicien Nekfeu aux côtés de Catherine Deneuve dans “Tout nous sépare” de Thierry Khlifa, nous ont donné envie de faire une liste de dix exemples de rappeurs devenus acteurs.
En interprétant avec talent le thriller psychologique de Thierry Khlifa, Tout nous sépare, le rappeur Nekfeu est loin d’être le premier de sa caste musicale à être passé devant la caméra. C’est même devenu une habitude depuis les débuts du hip-hop, le plus important des nouveaux genres musicaux de ces trente dernières années, dont les pratiquants sont souvent les plus aptes à devenir acteurs.
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En effet, grâce au parler-chanter du rap, reposant sur le flow (c’est-à-dire un débit régulier et inspiré), les rappeurs sont souvent des diseurs hors pair de textes élaborés reposant sur des rimes. Ce sont les interprètes idéaux pour scander des textes, mais aussi pour incarner des personnages de la rue, en raison de leurs origines souvent modestes et de leurs expériences personnelles dans la jungle urbaine, dont le cinéma se fait l’écho. A cet égard, le cinéma a souvent inspiré le hip-hop, qui le lui rend bien à travers ses représentants bigger than life. Ci-après, une sélection de dix importants rappeurs qui ont marqué le cinéma par leurs figures bouillantes et parfois excentriques :
Eminem
Un des seuls rappeurs célèbres de cette liste à n’avoir joué qu’un seul rôle dans un film de fiction, 8 Mile (2002) de Curtis Hanson. Un quasi-biopic, où il tenait le rôle très autobiographique de Jimmy alias B. Rabbit, Jr., inspiré de ses débuts difficiles parmi les white trash de Detroit, élevé dans une caravane, pratiquant l’art de la battle verbale avec maestria. Illustrant le complexe du rappeur blanc tentant de s’affirmer dans un milieu souvent dominé par les Afro-Américains, Eminem parvient à rendre son personnage fort et émouvant. Par la suite, il n’a fait que des caméos sous son propre nom, comme par exemple dans Funny people (2009) de Judd Apatow — avec un autre rappeur, RZA.
Snoop Dogg
Aujourd’hui un peu dépassé dans le hip-hop, cet ancien membre de gang a fait fructifier son expérience de la rue au cinéma, sans jamais obtenir de rôle majeur. Sans doute ses tendances légèrement loufoques l’en ont-elles empêché. Toujours est-il que, en tant que personnage secondaire, il fait à chaque fois merveille grâce à son attitude rasta-cool. On l’a vu dans Training Day (2001), sa première apparition au cinéma, où comme de juste il incarnait un dealer (mais en chaise roulante). Dans ce film dont Denzel Washington tenait le rôle principal (d’un flic ripou), on peut aussi voir un des comparses de Snoop, le légendaire producteur de hip-hop Dr. Dre. Par la suite, Snoop a joué “Huggy les bons tuyaux” dans la version ciné de Starsky et Hutch, et devrait tenir un des rôles principaux du prochain Harmony Korine, The Beach Bum.
Joey Starr
Ex-leader de NTM, le plus grand groupe de rap français, Joey Starr est passé graduellement du statut de musicien rebelle à celui de bon client des médias, et spécialement sur le petit écran, grâce à une attitude bourrue qui plaît tant. Ce qui a incité à lui proposer des rôles au cinéma. L’un des plus remarqués et salués étant celui d’un inspecteur dans Polisse de Maiwenn. Entre parenthèses, le fait de confier un rôle de flic à un rappeur, c’est-à-dire potentiellement une racaille, est devenu un quasi-cliché (voir Ice T). D’ailleurs, Joey Starr a moins convaincu dans d’autres registres, en particulier en installateur d’alarmes transi d’amour dans le mélo romantico-mollasson d’Emmanuel Mouret, Une autre vie.
Kool Shen
Plus calme et réservé que son comparse Joey Starr de NTM, Kool Shen n’a lui pas vraiment convaincu au cinéma ni fait beaucoup de tentatives comme acteur. Exception majeure : son personnage de mauvais garçon dans Abus de faiblesse, de Catherine Breillat, qui illustrait les mésaventures réelles de la cinéaste avec l’escroc Christophe Rocancourt. Sans jamais appuyer son jeu, ni tenter de composer un personnage, Kool Shen réussissait à rester crédible face à la grande Isabelle Huppert.
Ice T. (ne pas confondre avec Ice Cube)
Révélé dans New Jack City (1991) de Mario Van Peebles, considéré par certains comme le Scarface du hip-hop – en raison de son influence sur cette communauté musicale –, Ice-T y tenait d’emblée un rôle de flic lancé aux basques d’un parrain de la schnouff incarné par Wesley Snipes. Ce rôle colla à la peau du rappeur, qui est devenu par la suite un rond-de-cuir de la série télé New York unité spéciale, dont il est un des personnages (de policier) récurrents.
RZA
Leader du mythique Wu-Tang Clan, il a fait beaucoup de caméos au cinéma, mais pas de rôles importants. Exception néanmoins : le sketch hilarant de Coffee and cigarettes de Jim Jarmusch, qu’il joue avec son cousin GZA (autre membre du Wu-Tang) et l’acteur Bill Murray. Sans doute l’un des plus délirants (comme l’indique le sous titre de l’épisode, Delirium) épisodes de ce film loufoque.
Tupac Shakur
Carrière écourtée par son assassinat en 1996, qui a fait de lui le James Dean du rap, Tupac Shakur n’a pas eu le temps de tourner de film majeur, mais sa première apparition dans le polar Juice (avec d’autres rappeurs célèbres comme Dr. Dre et Queen Latifah), réalisé par Ernest R. Dickerson, un disciple de Spike Lee, fut néanmoins très remarquée. Il a ensuite effectué quelques caméos dans des œuvres comme Poetic justice (de John Singleton, réalisateur du mythique Boyz n the Hood). Cette année est sorti aux Etats-Unis son biopic intitulé All Eyez on me.
50 Cent
Curtis Jackson, alias 50 Cent, n’a pas eu la carrière cinématographique qu’il aurait voulu ou aurait dû avoir. Récemment on l’a aperçu dans un rôle d’ex-manager du héros boxeur de La Rage au ventre. C’est maigre. Mais la star du rap désirait ardemment devenir une superstar du cinéma, comme en témoigne le film Réussir ou mourir (2006), réalisé par le maestro irish du mélo social Jim Sheridan, dans le sillage du 8 Mile de Curtis Hanson avec Eminem. 50 cent tient également le rôle principal de cet “auto-biopic“ sur sa jeunesse difficile, avec la musique tirée de son propre album Get Rich or Die Tryin. Un ratage artistique, selon les rares qui l’ont vu…
Ice Cube (ne pas confondre avec Ice-T)
Lancé par Boyz n the Hood (1991) de John Singleton, l’un des premiers grands films de la sphère gangsta-rap, où il jouait un rôle assez proche de ses origines défavorisées, Ice Cube est devenu un familier du cinéma hollywoodien, un professionnel de la profession. Récemment, il s’est payé le luxe d’une œuvre retraçant ses débuts au sein du groupe NWA dans le quartier du Sud de Los Angeles, intitulée NWA : Straight Outta Compton de F. Gary Gray, qu’il a co-produite, tout en confiant à son fils, très ressemblant, O’Shea Jackson, son propre rôle.
https://www.youtube.com/watch?v=FZSMhvAYFZ4
Will Smith
On ne présente plus Will Smith, qui a plus ou moins remplacé Eddie Murphy comme comique black n°1 dans les années 90, avant d’incarner également des rôles plus sérieux. Exemple : le grand boxeur Mohammed Ali dans le biopic que lui a consacré Michael Mann. Smith est une figure tellement établie du cinéma hollywoodien qu’on a tendance à oublier qu’il députa dans le rap sous le nom de The Fresh Prince, ce qui le mena tout droit à la télévision où il connut un succès mérité avec la sitcom Le Prince de Bel Air. S’ensuivit une carrière à succès avec des blockbusters comiques (Men in black) ou non (Independence day).
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