discipline plus difficile qu’il n’y paraît : combien sont tombés dans la soupe sans s’en rendre compte, et tant d’autres qui ont alourdi leur propos jusqu’à le rendre rock et balourd ? Même le roi Jonathan Richman a fini par se mordre la queue dans l’autodérision. Son plus fidèle disciple reste Pat Fish. Sur la […]
discipline plus difficile qu’il n’y paraît : combien sont tombés dans la soupe sans s’en rendre compte, et tant d’autres qui ont alourdi leur propos jusqu’à le rendre rock et balourd ? Même le roi Jonathan Richman a fini par se mordre la queue dans l’autodérision. Son plus fidèle disciple reste Pat Fish. Sur la quantité d’albums qu’il a aujourd’hui alignés, il n’a perdu ni son inspiration ni la légèreté aérienne que requiert un morceau pop. Il n’a pas non plus perdu son enthousiasme cabotin : qui d’autre que lui peut faire un concert de deux heures devant quarante personnes en chantant les titres qu’on lui demande ? C’est simple, je ne vois pas de performer plus sympathique et qui rende toute sa noblesse au rappel, il est aujourd’hui le seul à ne pas obéir à un ordre préétabli du jeu des morceaux. Donc, c’est entendu, Pat est un chic type. S’il n’a rien perdu de toutes ses qualités et qu’il est pourtant moins présent dans les médias, c’est bien parce que nous, les fidèles, nous sommes habitués à ne voir en lui qu’un loser magnifique. Il faudrait recommencer une croisade, se battre pour le Jazz Butcher. Car Condition blue n’a rien de moins que ses prédécesseurs’ Au pire, il manque de ces hymnes fédérateurs que Pat Fish pondait à ses débuts. Ils sont aujourd’hui volontiers remplacés par des ballades presques poignantes (ici Still and all). La constante, c’est cette guitare aux sonorités aériennes estampillées (où a-t-il bien pu trouver ce son si léger qu’on ne retrouve nulle part ailleurs ?) et ses chansons pop passées à la moulinette de la furie (Shirley McLaine). Comme d’habitude, pas d’esbrouffe musicale, la mélodie est parfois si rêche qu’on ne peut pas qualifier Pat de faiseur de hit incompris, comme les défunts Go-Betweens. D’autant qu’il s’égare aussi quelquefois dans de longs labyrinthes psychés’ Alors, fort de toutes ces constatations, il faudra appréhender Condition blue avec des oreilles vierges d’a priori pour l’aimer ; et force sera de constater qu’en ces temps de disette mélodique et de boulimie de poudre aux yeux groovy, Pat Fish, lui, sait encore écrire un album qui tient la route et résiste aux intempéries de saison.