En voyage officiel pour une semaine à New York, le numéro deux du gouvernement enchaîne à tour de bras les rendez-vous, préempte le dossier du Mali et est l’invité du célèbre talk show « CharlieRose »
Tunisien, russe, cambodgien, mauritanien, marocain, algérien, rwandais, israélien, tunisien, éthiopien (« sous confirmation », indique-t-on dans son entourage)… Autant de ministres des Affaires étrangères que Laurent Fabius rencontre en quelques jours à New York. Sans oublier la présidente de l’Union africaine. Sans compter les rendez-vous diplomatiques de François Hollande auxquels il participe avec notamment le dîner officiel organisé par le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon. Ni les réunions avec ses homologues du Conseil de sécurité de l’Onu, sur le Sahel, la Syrie et le Mali, notamment.
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Devant une quarantaine de journalistes réunis à la mission permanente de la France aux Nations Unies, Laurent Fabius, se met même à annoncer, ce 24 septembre à New York, que Bamako a officiellement demandé une intervention militaire internationale dans le nord du Mali, actuellement aux mains de groupes islamistes. Manifestement, ce n’était pas prévu par le secrétaire général des Nations Unies… Tant pis, Fabius dit tout. Il va jusqu’à lire la lettre du président malien, Dioncounda Traoré, et de son premier ministre, Cheikh Modibo Diarra, adressée au secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, une résolution du Conseil de sécurité demandant « l’intervention d’une force militaire internationale afin d’aider l’armée malienne à reconquérir les régions du Nord occupées ». L’info est reprise partout. Fabius a marqué un point. Il est associé à la lettre.
Exit le ministre de la Défense
Pas de doute : Laurent Fabius compte bien préempter le dossier du Mali, en France comme à l’international. « Je suis personnellement chargé de ce dossier », lâche-t-il. « Nous avons déjà pris pas mal de contacts avec nos collègues du Conseil de sécurité, en particulier les Russes, les Chinois, pour leur exposer ce qui est en cause et les convaincre de la nécessité d’intervenir », ajoute-t-il espérant qu’une décision serait « prise rapidement » notamment par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) dont le ministre souhaite qu’elle joue le premier rôle. Une grande salle vitrée au quarante-quatrième étage, mes buildings de Manhattan dans le dos, le numéro deux du gouvernement marque son territoire. Et pas question de laisser échapper ce dossier. « C’est la diplomatie en premier », indique-t-on dans son entourage. En somme, exit son confrère, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.
Pour être bien clair sur le fait que la partie ne se joue pas sur le terrain de la défense en France, une fois que les opérations auront été lancées, il martèle qu' »il n’est pas question de se substituer à quiconque mais d’aider à ce que le Mali recouvre son intégrité » et que la France n’a « pas du tout l’intention d’avoir des troupes au sol ». « C’est aux Africains d’agir. Si notre aide est requise, elle sera apportée, mais pas sous l’aide d’une présence militaire au sol », répète-t-il.
Et pour insister sur l’importance d’une telle intervention et de l’utilité de son rôle dans ce dossier, il évoque les répercussions qu’il pourrait y avoir en France si le problème n’est pas réglé rapidement.
« Quand on se réfère à la doctrine de ces groupes intégristes et singulièrement d’Aqmi (Al-Qaida au Maghreb islamique), la France est en ligne de mire, donc même s’il n’y a pas tel ou tel point précis, nous devons être extrêmement vigilants », précise Laurent Fabius. « Nous sommes très attentifs à la fois en Afrique en général et sur le territoire français. D’une façon générale l’ensemble des pays démocratiques est menacé par ce genre d’organisation. »
Le ministre d’Etat porte bien son titre… Les caméras se bousculent à l’issue de la conférence de presse pour obtenir une interview du chef de la diplomatie. Ce mercredi, il sera au cœur d’une réunion sur le Sahel organisé par le secrétaire général des Nations Unie, Ban Ki-Moon, à l’initiative de la France par la voix de Laurent Fabius. La boucle est bouclée. Avec l’objectif pour le ministre de parvenir à une solution diplomatique qui ne ferait que renforcer in fine, en cas de succès, son propre poids politique…
Celui qui ne s’arrête jamais, tel un robot, disent certains, poursuivra son marathon new-yorkais en étant l’invité du show américain CharlieRose. Lundi soir, c’était le président égyptien qui en était l’invité. Not bad pour Laurent Fabius de passer après un président… « Après tout ça, je me rendrai vendredi à la représentation de Carmen de Georges Bizet… Avant de m’écrouler de fatigue », lâche-t-il en plaisantant. Le passage à New York n’aura pas servi à rien…
Marion Mourgue, envoyée spéciale à New York
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