En juin, on saluait la première livraison d’un très bon magazine de cinéma, So Films. Au troisième round, le mag n’a toujours pas fléchi et tient son cap à la fois déluré et érudit. Il a même réussi ce mois-ci un coup superbe : obtenir un long entretien avec Jean-Pierre Léaud, comédien que l’on sait […]
En juin, on saluait la première livraison d’un très bon magazine de cinéma, So Films. Au troisième round, le mag n’a toujours pas fléchi et tient son cap à la fois déluré et érudit. Il a même réussi ce mois-ci un coup superbe : obtenir un long entretien avec Jean-Pierre Léaud, comédien que l’on sait fragile, qui s’est fait très rare ces dernières années et dont on n’a pas lu d’interview depuis une quinzaine d’années.
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L’acteur y évoque bien sûr les grands temps de sa carrière, son lien intense à Truffaut, l’ébullition militante de ses années Godard, la difficulté à jouer en une prise les longues tirades de La Maman et la Putain devant un Eustache qui ne tolérait pas que l’on déplace une virgule, son statut totalement revendiqué de mascotte de la Nouvelle Vague (« Je suis le meilleur label Nouvelle Vague du monde », dit-il en riant). Et puis des choses moins connues, plus intimes, comme la relation à un père scénariste dans le cinéma plus traditionnel qui a profondément haï la Nouvelle Vague. Ou encore sa première dépression, à 19 ans, sur le tournage de Porcherie de Pasolini (où, il est vrai, il se faisait dévorer par des cochons).
Il livre au passage quelques clés sur son art génial de comédien. Ce qu’il attend d’un cinéaste : « qu’il me permette de réaliser mon film à l’intérieur du film ». Et enfin, ce qui serait pour lui la gratification suprême : non pas qu’on le considère comme un grand acteur, ni comme un artiste majeur, mais plutôt comme « un intellectuel ». Le terme (assez dévalué de nos jours) peut surprendre, mais il n’est pas incongru.
Là où tant d’acteurs semblent imiter leur personnage de façon platement figurative, Jean-Pierre Léaud, à force de stylisation, de subtile mise à distance, produit de la pensée sur son personnage, produit de la pensée sur le cinéma. En cela, chacune de ses apparitions à l’écran est bel et bien un acte intellectuel.
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