En plein essor mais menacé par la censure, le gaming érotique pourrait choisir la stratégie de la niche.
Mi-mai 2018, de nombreux développeurs de jeux vidéo dits “adultes” disponibles sur Steam, la plate-forme de gaming PC aux 150 millions d’utilisateurs et aux 18 000 jeux, reçoivent un e-mail de Valve (propriétaire du portail) les intimant de régulariser leur contenu pornographique, sans quoi leurs titres disparaîtront du catalogue.
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Une attaque dirigée contre une catégorie de jeux olé-olé comme HuniePop, puzzle game associant les coups gagnants à l’effeuillage d’avatars féminins, mais surtout contre la catégorie bien plus vaste, très populaire au Japon, des visual novels, ces œuvres très sophistiquées du point de vue des interactions sociales et physiques possibles, à mi-chemin entre le hentai et le livre dont vous êtes le héros.
Ainsi, le studio Winter Wolves, éditeur du RPG (“role playing game”) mâtiné de romance bisexuelle Cursed Lands, ou son homologue Top Hat, spécialiste du genre (Girls and Dungeons, Karmasutra), se voient donner trente jours pour éliminer tout contenu pornographique de leurs titres. Autant dire qu’ils sont invités à débarrasser le plancher.
Une armée de tank girls affriolantes
D’autres sont épargnés, comme certains blockbusters, pourtant partiellement explicites. Assez pour inspirer à Joe “Bonesy” Brown, fondateur de Top Hat Studios, une petite gueulante. “Il y a un double standard, selon lequel des jeux comme The Witcher ou Dragon Age peuvent montrer des tétons, mais pas les jeux animes”, s’insurge-t-il.
Quelques jours plus tard, surprise : Valve fait machine arrière et autorise finalement tous les contenus “tant qu’ils ne relèvent pas de l’illégalité ou du trolling”. Coup habilement rattrapé ? Pas si sûr. Car à force d’être ainsi baladés les développeurs spécialisés pourraient surtout se faire la malle vers des plates-formes dédiées.
On a ainsi vu le développeur de HuniePop se fendre de messages ambigus : “On apprécie le geste, mais ne vous sentez pas obligés d’acheter nos titres sur d’autres plates-formes en signe de protestation. Même si bon, Fakku (éditeur de hentai multi-support – ndlr) est un bon endroit pour le faire.”
Sur Google Play, l’éditeur d’Armor Blitz, qui propose de monter son armée de “tank girls” affriolantes, n’était parvenu qu’à rembourser de moitié son budget de développement en 2016. En migrant sur la plate-forme adulte Nutaku, en épaississant notablement le caractère pornographique, il a multiplié ses recettes par sept.
Sera-t-il suivi ? Probable, tant ces portails spécialisés explosent, notamment sur mobile, comme le plus indé Eroges (250 000 abonnés depuis novembre). Mais le risque est aussi de ghettoïser le gaming érotique, avec pour corollaire un virage puritain d’une partie de l’offre mainstream. Le géant incontesté du jeu qu’est Steam va-t-il ainsi passer à côté de la prochaine zone érogène ?
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