Et ça marche. Du moins sur moi.
Il existerait une recette de penne à la vodka hautement aphrodisiaque, capable de mettre n’importe quel individu dans votre lit pour y passer plusieurs heures de pur bonheur. Pire, cette recette se partagerait dans le plus grand secret des salons huppés des femmes célibataires de Manhattan, depuis une vingtaine d’années. C’est Cole Kadzin qui brisait l’omerta le mois dernier et révélait au monde son secret pour choper, sur le site féminin américain refinery29. Avec la recette détaillée des come fuck me penne, les “penne-viens-me-baiser” en bon français.
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Évidemment, Internet lui est tombé dessus. Moi aussi, au début, j’ai eu une gentille envie de secouer l’auteur dudit article et de lui expliquer que sa target en question aurait probablement eu envie d’elle quel que soit le plat cuisiné, et qu’il n’était évidemment pas venu pour les pâtes. “Y’a vraiment des femmes seules et désespérées pour croire à ce genre de truc”, s’est gaussé un journaliste américain à propos des-dit penne. “Vous coucheriez avec une fille qui suit méthodiquement une recette, dans le but désespéré de coucher ?”, renchérissait un autre. C’est là que je me suis dit qu’Internet et moi, on n’avait rien compris.
Déjà, soyons honnête, comme si on avait pas tous l’équivalent de nos penne-viens-me-baiser. Nos petites astuces, secrets, tentatives pour arriver à nos fins et surtout nous donner confiance. Moi, perso, j’ai ma “robe de la chope.” Une pote a un body American Apparel moitié transparent rebaptisé “le body 100%”, tu comprendras ce que ça veut dire. Un ami me racontait avoir rencontré un Suédois sublime à moustache de 35 ans qui lui a récité Ophélie à 8 heurs du mat au Berghain, à Berlin. Sérieux. Moi j’en suis sûre, c’était ça les sous-titres :
“O pâle Ophélia ! belle comme la neige ! (Viens me baiser)
Oui tu mourus, enfant, par un fleuve emporté ! (Viens me baiser)
C’est que les vents tombant des grands monts de Norvège (Viens me baiser)
T’avaient parlé tout bas de l’âpre liberté” (Ou au moins roule-moi une pelle, que je me sente exister).
Face-palm et sorcellerie
Du mépris envers Cole Kadzin, je suis même passée à une certaine admiration. Oui, admiration. Et j’ai voulu lui rendre hommage en testant ces fameux penne. Vous devez toutefois savoir que l’expérience sociologique que vous vous apprêtez à lire manque d’une certaine rigueur. L’Américaine recommande de cuisiner ce plat chez vous, au 3ème rencard avec un mec avec qui vous n’avez jamais couché. J’avais sous la main un cobaye que je connaissais un peu plus que ça, chez qui je suis allée cuisiner les fameux penne, et qui était parfaitement au courant du sortilège que j’allais tenter de lui jeter. N’importe quelle sorcière se face-palmerait à me lire.
Parce que c’est ça en fait, les penne-viens-me-baiser. C’est l’équivalent moderne des philtres d’amour, des marabouts, ou de la sorcellerie. Une tentative vaine et toute pétée de percer cette saleté de mystère insondable qu’est l’autre. “Il n’y a pas de rapport sexuel” disait le psychanalyste chelou Jacques Lacan. Dans le sens où tu ne sauras jamais vraiment tout ce qui se passe dans la tête de la personne devant, derrière toi, sous, ou sur toi. Même au plus proche possible de l’autre, y’a toujours un truc qui t’échappes, tu finis toujours par buter contre un mur.
Du côté de mon expérimentation concrète, la vie a décidé de me traiter avec douceur. Par un heureux retournement de situation, c’est le jeune homme chez qui j’étais qui m’a cuisinée les penne-viens-me-baiser. Je devenais le cobaye. Je “goûtais” donc à la vodka qu’on allait ajouter à la sauce, et délivrais sur un ton délibérément autoritaire les instructions de Cole Kadzin. Va savoir. Peut-être que ça n’avait rien à voir avec les penne et leur sauce mijotante. Ou peut-être que Cole Kadzin est une vraie sorcière. Mais la dernière instruction que j’ai donné, c’est « éteins tes plaques ».
Et on n’est pas si mal, finalement, plaquée contre le mur des mystères insondables.
La recette des penne-viens-me-baiser
Une gousse d’ail
Deux échalotes
Quelques feuilles de basilic
Une boite de sauce tomate fraîche
Un peu de poivre rouge
Un verre de vodka
Du parmesan
Du vin rouge pour accompagner
1/Emincer l’ail et l’oignon et les faire revenir doucement à la poële avec de l’huile ou du beurre.
2/Quand ils deviennent transparents, ajouter un tiers de verre de vodka, laisser évaporer. Quand la vodka est évaporée, ajoutez la sauce tomate et le basilic. Remuer doucement, à feu moyen.
3/Quand la sauce est épaisse, ajouter le reste de vodka et laisser mijoter à feu doux.
4/Faire cuire les penne comme indiqué sur le paquet. Une fois les penne cuits et égouttés, ajoutez le parmesan directement dans la passoire.
5/Laissez la sauce reposer dix minutes avant de mélanger aux pâtes
6/Servir avec du vin rouge.
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