Derniers survivants parmi les pionniers de la brit-pop, les Charlatans se renouvellent timidement en empilant les emprunts. Entre troisième et quatrième titres, un changement d’aiguillage à décoller la casquette du plus chevronné des chefs de gare (la tornade soul de Love Is the Key semant inopinément la panique dans la kermesse hillbilly de A Man […]
Derniers survivants parmi les pionniers de la brit-pop, les Charlatans se renouvellent timidement en empilant les emprunts.
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Entre troisième et quatrième titres, un changement d’aiguillage à décoller la casquette du plus chevronné des chefs de gare (la tornade soul de Love Is the Key semant inopinément la panique dans la kermesse hillbilly de A Man Needs to Know qui lui succède) prouve qu’en rédigeant la conclusion des Commitments, Roddy Doyle faisait preuve d’une belle prescience. Dublin, 1987 : suite à quelques coucheries désordonnées, un groupe de dingues de James Brown vient de se séparer. Mais, rompu aux ficelles de la relance de carrière, son manager érudit le ramène illico à la vie en lui faisant découvrir le I’ll Feel a Whole Lot Better des Byrds période Gene Clark ; une paire de pseudonymes plus tard, la country irlandaise est née et, entraîné dans la ronde si britannique des fads, des trends et du bandwagon jumping, le lecteur se marre franchement.
Des retournements de veste (à franges ou en satin), le Wonderland des Charlatans en est ainsi truffé. Le coq-à-l’âne précipitant un Beck superlativement cocksure (Love Is the Key trépigne du croupion comme un Midnight Vulture en rut) dans les bras de Dolly Parton (A Man Needs to Be Told et sa pedal steel pleureuse) ferait figure d’excellent gag, si Sly & The Family Stone n’avaient, avec un culot renversant, déjà mis funk et yodel en orbite autour de la planète Pétard (Spaced Cowboy, 1971). Car, à force de multiplier les emprunts filous, les Charlatans attirent fatalement les comparaisons. Pas forcément flatteuses. Quand, dans Judas, Tim Burgess chourave le falsetto de Mick Jagger déguisé en « chevalier en armure étincelante » (sur Emotional Rescue) et le greffe sur des guitares droguées volées aux Beatles de Tomorrow Never Knows (sur Revolver), le larcin est plutôt malin d’autant qu’à l’origine Emotional Rescue était déjà une farce. Initier Elvis Presley aux spiralants délices du psychédélisme (Is It in You’ offre au célèbre « a hunk of burnin’ love » du Pelvis de Memphis un matelas de flûtes lysergiques) amusera la galerie mais, sur le titre d’ouverture, emprunter aux Sex Pistols les paroles du formidable Pretty Vacant tout en les privant de leur chute sardonique (« nous sommes si jolis, si joliment… creux ») relève du sacrilège bébête. Tant que les Charlatans se contentent de faire la bringue avec leurs contemporains The Bell and the Butterfly est du pur Chemical Brothers parfumé à la nitroglycérine, Is It in You’ chaparde les chœurs féminins de Moby, autre incorrigible kleptomane , Wonderland invite l’auditeur à une petite surboum endiablée, avec groove va-t-en-guerre, claviers coquins et scratches sémillants. Mais la servilité de certains pastiches et l’insignifiance des textes (en matière de poésie foldingue, Burgess se retrouve régulièrement le Beck dans l’eau, et on est prié de ne pas mentionner ici Lewis Carroll) débouchent finalement sur un album plus Wonderbra que Wonderland des arrangements avantageux parvenant mal à dissimuler le fait que, question inspiration, il n’y a pas grand monde au balcon.
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