Un frigo intelligent aide un jeune musicien à écrire ses chansons. Une comédie loufoque et généreuse.
Objectophile, cette édition 2019 de la Quinzaine des réalisateurs s’est ouverte sur l’histoire d’un homme amoureux de son blouson en daim, elle se clôture avec le récit de la relation d’un autre homme, cette fois avec son frigo intelligent.
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Dans Yves, le troisième long métrage de Benoît Forgeard, après le film à sketch Réussir sa vie (2011) et Gaz de France (2015), Jérem, un jeune rappeur – le genre loser, vivant dans la maison de sa grand-mère décédée et y accumulant chaussettes sales et peaux de banane – voit sa vie transformée le jour où il accepte de servir de cobaye à une entreprise qui tente d’introduire sur le marché un réfrigérateur intelligent qui, en plus de faire les courses et de veiller à l’alimentation saine de son propriétaire, est un véritable coach de vie.
Ainsi, son frigo, prénommé Yves, va finir par aider Jérem à trouver l’amour et surtout à composer ses morceaux (dont le tube Carrément rien à branler qui devrait résonner sur le dancefloor de la clôture de la Quinzaine) et faire de lui une star. Mais entre l’homme et cette Alexa qui garde la bière au frais, se pose rapidement la question de savoir lequel des deux est le véritable artisan de ces succès.
Un HAL compositeur
Entre Phantom of the Paradise de Brian De Palma (1975) et Her de Spike Jonze (2014), le film articule sa réflexion sur la création artistique à l’heure de l’arrivée dans les ménages de l’intelligence artificielle, mais il le fait dans le registre d’une comédie absolument irrésistible, la plus réussie de ce Cannes 2019. Sa drôlerie repose d’abord sur un casting habillement composé (William Lebghil est excellent dans ce rôle de rappeur/alter ego du réalisateur dandy, Philippe Katerine est toujours aussi délicieux et Doria Tillier, échappée du cinéma de Nicolas Bedos, trouve ici son meilleur rôle).
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Mais l’ensemble brille également grâce à une efficacité et une générosité d’écriture que Benoît Forgeard semble avoir atteinte avec ce toujours aussi délirant troisième film. Il y a d’ailleurs un parallèle à faire entre ce récit d’un musicien qui cesse de faire des morceaux de puriste, dans son coin et sans que cela ne touche le grand public, et ce film où Benoit Forgeard prodige aux spectateurs des caresses un peu plus dans le sens du poil, laissant un peu de côté l’humour d’esthète revêche qui le caractérisait jusque-là.
Yves de Benoît Forgeard, avec William Lebghil, Philippe Katerine, Doria Tillier (France, 2019, 1h47)
Quinzaine des réalisateurs, film de clôture
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