Etait-il bien raisonnable de placer autant d’espoirs dans une fille qui ne cesse de confesser sa nature indécise (“Ooh hey, I’m trying to decide which way to go“), qui s’exaspère à vouloir porter “tous ses sacs” à la fois (Bag Lady) tout en ne sachant lequel lâcher ? Erykah Badu, une enfant gâtée que les […]
Etait-il bien raisonnable de placer autant d’espoirs dans une fille qui ne cesse de confesser sa nature indécise (« Ooh hey, I’m trying to decide which way to go« ), qui s’exaspère à vouloir porter « tous ses sacs » à la fois (Bag Lady) tout en ne sachant lequel lâcher ? Erykah Badu, une enfant gâtée que les hommages incessants rendus à sa beauté ont livré à l’imprévisible rebond d’incontrôlables caprices ? Questions qui demeurent en suspens avec un troisième album au terme duquel on reste sur sa faim.
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L’album s’ouvre sous une cascade de piano électrique, de nappes de synthés contribuant à une esthétique minimaliste de bon augure. A la fin de Bump It, la belle se retrouve dans le plus simple appareil, plongée au cœur d’une jungle nocturne qu’elle joue à sonder avec l’écho que renvoie sa propre voix, d’une manière hautement érotique. Elle qui se montrait sur le précédent si contrainte par la rigidité des styles, si encombrée d’accessoires, se présente à nous enfin libre de ses mouvements. Le « Underground » du titre de l’album trouve dans ce radicalisme sonore une justification, sinon un sens.
Mais voilà : Erykah Badu est l’un des derniers joyaux de la maison Motown, dont la spécialité a rarement été l’avant-garde. Et il semblerait que, dans ce disque, on ait voulu concilier une nature d’aventurière incomplètement révélée et une vocation de star au potentiel commercial imparfaitement exploité. Si bien que l’on se retrouve avec un album fait de très bons moments (The Grind), ne manquant pas de groove, mais en recherche permanente d’un centre de gravité. Et si le problème d’Erykah Badu venait de l’inconvénient d’être si belle ? Sur son récent Love & Life, Mary J. Blige, que la nature a moins gâtée, s’en tient à une unique mission : séduire. Son disque est celui d’une gagneuse, sans méandres, direct. Sur le livret de l’album, elle est photographiée sous toutes les coutures, là où notre Vénus noire, pour qui la bataille de la séduction n’a jamais eu à être menée, se cache derrière une coiffure afro à la Angela Davis/Roberta Flack. Ce qui, finalement, en dit assez long sur ce qu’il lui reste à accomplir pour devenir, enfin, une artiste à part entière.
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