Zombie du passé et adolescentes d’aujourd’hui dialoguent dans un beau teen movie fantastique.
Avec Zombi Child, son huitième long métrage, le réalisateur du somptueux Saint-Laurent revient à une veine plus intimiste, celle des premières œuvres comme Tiresia, empreinte d’étrangeté, baignée d’onirisme et de magie noire.
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Cette magie prend corps dans le cadre pourtant très policé d’un pensionnat de jeunes filles (la maison d’éducation de la Légion d’honneur à Saint Denis), où un groupe d’adolescentes unies par les liens d’une sororité accueillent en leur sein la descendante haïtienne d’un ancien esclave réincarné en zombie après avoir été enterré vivant.
Croquer la vie à pleines dents
Très vite, le film instaure un parallèle entre les cérémonies secrètes et profanes de ces jeunes filles (toutes merveilleuses de malice bravache mélangée sur leurs visages poupins à un reste d’enfance) et une sorcellerie ancestrale à travers des flash-back d’une nocturne et vénéneuse beauté.
Bonello a toujours su admirablement filmer les bandes, ces humeurs collectives si bien agencées dans L’Apollonide ou Nocturama, et sait aussi capter les ondes du contemporain, en grand chaman connecté à la jeunesse quand il met en scène ces damoiselles fredonnant comme un secret les mots virils du chanteur de rap Damso (« J’m’en fous d’être ton boyfriend / C’est ton cul moi que je veux« ).
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L’imaginaire gothique des âmes blanches dans la nuit, le retour des forces occultes, bientôt un chagrin d’amour – de ceux qui tuent, Werther ou d’autres –, tout cela imprègne ce grand film qui est aussi un drame social, cette revanche des opprimés, l’homme noir contre l’homme blanc, accomplissant sa vengeance à travers un chant ressuscité du passé : « Hommes blancs / Entendez le zombie rugir. »
De manière curieuse, comme si lui-même succombait à un charme, Zombi Child se délite dans sa dernière partie : le scénario, jusqu’ici très tenu, se perd dans la profondeur immersive d’une cérémonie vaudoue à laquelle on peine à prendre part, perdu dans cette fin très ésotérique.
Zombi Child de Bertrand Bonello, avec Wislanda Louimat, Louise Labeque, Adilé David (France, Haïti, 2019, 1h43)
Quinzaine des Réalisateurs, sélection officielle
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